Par Antonio RODRIGUEZ, 17 Février 2007
Des milliers d'immigrés clandestins sont détenus par les autorités américaines dans des tentes de fortune à la frontière du Mexique, loin de leurs familles et sans recours légal, dénoncent des organisations humanitaires.
"C'est comme Guantánamo, à la différence que les immigrés ne sont pas des terroristes"" indique Brent Willes, directeur de la Ligue des citoyens latino-américains unis (LULAC), évoquant les quelque 26.500 sans-papiers détenus, le plus souvent sans assistance juridique. Sous la pression du Congrès dans sa lutte contre l'immigration illégale, le Département de la Sécurité Intérieure a augmenté il y a un an les rafles contre les immigrés clandestins et accru la capacité d'accueil des centres de détention pour éviter leur libération, ce qui arrivait par le passé faute de place.
Pour abriter les détenus, le gouvernement a créé un centre de détention à Raymondville (Texas, sud), à quelques kilomètres de la frontière avec le Mexique, où plus de 2000 détenus vivent dans dix grandes tentes en attendant leur expulsion. Les conditions de détention des immigrés, qui n'ont pas droit à un avocat commis d'office, ont suscité une vague de critiques de la part de plusieurs organisations, comme l'Association du Barreau Américain (ANA) qui a écrit une lettre au Congrès pour lui signifier son indignation. "Nous nous opposons au transfert contre leur volonté de détenus immigrés et de réfugiés lorsque que cela empêche d'établir une relation entre un avocat et son client et complique la possibilité de trouver quelqu'un pour assurer leur défense", indique l'ABA dans sa lettre. "En créant une ville de toile dans un lieu aussi isolé, même les organisations qui apportent une aide légale gratuite ne peuvent pas entrer en contact avec les détenus et c'est un énorme problème"" regrette Sarnata Reynolds, responsable d'Amnesty International pour les réfugiés.
L'avocat Douglas Wachholz, basé dans la région de Washington a dénoncé le fait qu'une de ses clientes, Leticia Chavez, de nationalité mexicaine, ait été transférée de Virginie (est) à Raymondville dans un vol de nuit, les mains attachées, sans être autorisée à téléphoner à son consulat ou à son avocat. "Emmener une personne de force pour l'incarcérer si loin de son avocat et de sa famille, pour l'isoler dans une tente à côté de la frontière est une violation de la Constitution. Là-bas, elle n'a aucun droit", a souligné Wilkes. "Le gouvernement s'efforce de démontrer qu'il applique les lois contre l'immigration en faisant des descentes massives mais sans disposer de centres ayant la capacité" de contenir les personnes arrêtées, regrette-t-il. Le président américain George W. Bush lui-même a reconnu en diverses occasions que les Etats-Unis ne pouvaient expulser les quelque 12 millions de travailleurs clandestins se trouvant sur leur territoire, demandant une réforme de l'immigratiion au Congrès qui puisse ouvrir la voie à une régularisation des immigrés clandestins. Estimant ""horribles"" les conditions de détention des immigrés et leur ""entassement"", l'Union pour les libertés civiles (ACLU) a décidé pour sa part de porter plainte contre une prison de San Diego, dans le sud de la Californie, où croupissent 1000 sans-papiers. ""Garder ces personnes dans des prisons surpeuplées et sans sécurité pendant des mois voire des années est pervers et inhumain"", a indiqué ACLU dans un communiqué, relevant en outre l'existence de mauvais traitements et de propagation de maladies en prison. Dans un document interne, le département de la Sécurité Intérieure a reconnu lui-même l'existence de mauvais traitements et de conditions de détention difficiles ne respectant pas les normes dans certains centres d'incarcération dont la prison de San Diego.
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