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dimanche 16 mars 2008

La première du documentaire cubain «Un lieu appelé Guantánamo»

par Cubarte, 14 mars 2008
Exhiben premier del documental Un lugar llamado Guantánamo
Un lugar llamado Guantánamo (Un lieu appelé Guantánamo), un documentaire montrant le véritable territoire ainsi nommé, où les Etats-Unis usurpent 117,6 kilomètres carrés, a été présenté en unique projection dans cette province.
Cette production de Mundo Latino, dirigée par Rolando Almirante, sera prochainement au programme de la télévision cubaine. Ce documentaire est une promenade dans l´histoire de ce territoire, possesseur d´une baie découverte par Christophe Colomb en 1494 et ambitionné dés 1741, quand les Anglais l´ont occupée et l’ont appelé Cumberland.
Pour les habitants, de la campagne et des villes, ce documentaire montre le révolutionnaire Guantánamo, qui n’a rien à voir avec le centre international de tortures en lequel les Etats-Unis ont converti la base illégalement occupée depuis 1898, contre la volonté du peuple cubain.
Le film établi un profond contraste, dans lequel, d´une part, il présente l’harmonieux développement socioéconomique de Guantánamo et, d’autre part, raconte l´histoire des intromissions et des agressions depuis l´enclave militaire, qui représente à peine 1,8 pour cent du territoire de la province.
L´histoire, contée en 45 minutes, recueille des moments indispensables comme l’Operación Antiaérea (L’Opération Antiaérienne), quand les forces rebelles commandées par Raúl Castro ont capturé des techniciens nord-américains pour dénoncer au monde l´appui étasunien, depuis la base, à l´armée de Fulgencio Batista.
Des images réfléchissent la présence des 57 mille cubains qui ont travaillé durant des décennies dans la base navale et dont ils ne restent seulement que trois, des témoins singuliers d´une présence finie, comme le souscrit le Serment de Baraguá.
Source : http://www.ahora.cu/modules.php?name=News&file=article&sid=7553

samedi 18 août 2007

L'Empire et l'île indépendante

par Fidel Castro, 14 août 2007
"A quoi pouvaient donc servir l'amendement Platt et la Base navale de Guantánamo? L'histoire prouve que les Etats-Unis n'ont eu besoin ni de celui-là ni de celle-ci dans un grand nombre de pays du sous-continent, où aucune révolution n'a eu lieu, pour dominer ces territoires gouvernés par les transnationales etles oligarchies. La publicité se chargeait de leur population mal préparée et pauvre en majorité en y semant des réflexes conditionnés.
Du point de vue militaire, un porte-avions nucléaire emportant de rapides chasseurs-bombardiers et accompagné de son escorte, faisant fond sur la technologie de pointe et sur les satellites, est plusieurs fois plus puissant qu'une base et peut se rendre n'importe où dans le monde au gré de l'Empire. En fait, la Base navale de Guantánamo n'est là que pour humilier et pouvoir y faire les choses épouvantables que l'on sait.
S'il faut attendre la chute du système, soit, nous attendrons ! Les souffrances et les périls seront grands pour toute l'humanité, au moins autant que la crise actuelle de la bourse des valeurs, comme le pronostiquent toujours plus de gens. L'attente de Cuba, elle, se fera toujours en état d'alerte."
C'est par ces mots que se conclut une longue réflexion de Fidel Castro, publiée par la prese cubaine cette semaine et consacrée à l'histoire de l'amendement Platt et de la base de Guantánamo. Une véritable leçon d'histoire à l'usage des jeunes générations que ce texte, dont nous ne pouvons que vous recommander la lecture.
À lire en français ici

Reflexiones del PRESIDENTE FIDEL CASTRO
El imperio y la Isla independiente
La historia de Cuba en los últimos 140 años es la de la lucha por preservar la identidad e independencia nacionales, y la historia de la evolución del imperio de Estados Unidos, su constante pretensión de apropiarse de Cuba y los horrendos métodos que hoy utiliza para mantener el dominio del mundo. Destacados historiadores cubanos han tratado con profundidad estos temas en distintas épocas y en diversos y excelentes libros que merecen estar al alcance de nuestros compatriotas. Estas reflexiones van dirigidas especialmente a las nuevas generaciones con el objetivo de que conozcan hechos muy importantes y decisivos en el destino de nuestra patria.

vendredi 20 juillet 2007

Guantánamo Bay, 11 juillet 1962 : qui a tué Rodolfo Rosell ? Il y a 45 ans, l’assassinat d’un humble pêcheur

PAR LISANKA GONZALEZ SUAREZ, Granma international

LES recherches concernant le pêcheur Rodolfo Rosell se sont achevées le 14 juillet 1962 quand ses camarades de la coopérative de pêche et les garde-côtes cubains l’ont découvert mort dans son bateau Las dos hermanas.
Sur la poupe de l’embarcation son cadavre était veillé par son chien fidèle, qui ne cessait d’aboyer. On a appris plus tard qu’il était mort des suites d’une hémorragie intracrânienne, provoquée par trois coups énormes sur la tête, mais son corps présentait aussi des blessures causées par un instrument tranchant, ce qui démontrait qu’il avait été torturé.
Qui était ce pêcheur ? Pourquoi un tel acharnement ?
Rodolfo Rosell Salas était un homme sans histoires de 29 ans, père de deux enfants et d’un troisième en route, qui travaillait durant la journée comme employé dans la coopérative de pêche Gustavo Fraga et qui partait en mer chaque nuit pour pêcher. C’était un bon travailleur et il avait rejoint les Milices nationales révolutionnaires de son centre.
Rosell n’ignorait pas le danger que représentait la traversée du canal d’entrée de la baie de Guantánamo, car d’après son épouse, on avait déjà tiré sur lui une nuit. Dans la soirée du 11 juillet 1962, comme tant d’autres fois, il a quitté sa femme et ses enfants ; aucun d’entre eux ne soupçonnait qu’ils ne se retrouveraient plus jamais. « Ca été très dur, et pire encore pour les enfants, car ils ont été privés de la chaleur paternelle », se rappelle sa veuve avec amertume.
Des documents de l’époque témoignent que son enterrement a constitué une grande manifestation de deuil à Caimanera, en même temps qu’un rejet énergique de la barbarie nord-américaine de la part du peuple cubain.
Six jours après sa mort, naissait son troisième enfant, Reina (Oh père ! ils n’ont eu aucune pitié pour toi, et j’ai vécu sans t’avoir connu mon père ! écrirait l’enfant quelques années plus tard).
A cette date le gouvernement de l’île avait déjà déclaré publiquement sa décision de suivre la voie du socialisme, les grands monopoles nord-américains établis à Cuba avaient été nationalisés, l’invasion de Playa Giron avait été écrasée, plusieurs plans d’assassinat du chef de la Révolution cubaine avaient été déjoués, parmi de nombreuses autres tentatives d’intimidation.
Parallèlement, quelques jours auparavant des terroristes cubains avaient perpétré plusieurs actes de sabotage non seulement dans le but de terroriser le peuple cubain mais aussi de justifier leur salaire qu’ils recevaient de la CIA. Ils choisissaient presque toujours les cibles les plus vulnérables : un mitraillage contre une automobile sur la route, une attaque contre une famille paysanne, et maintenant, l’assassinat d’un humble pêcheur de Caimanera, une cible idéale pour leurs grands projets.
Rodolfo Rosell ne serait pas la seule victime à cet endroit du territoire, il y eut aussi le pêcheur Ruben Lopez Sabariego ainsi que les soldats de la brigade de la frontière Ramon Lopez Peña et Luis Ramirez Lopez. La mort les a tous fauchés sur ce morceau de terre de l’île que les Etats-Unis occupent contre la volonté de Cuba et qui constitue toujours un antre de la mort.
Depuis l’assassinat du pêcheur Rosell 45 ans sont passés et sa famille attend toujours que justice soit rendue. Tandis que les assassins se promènent comme des héros sur le territoire d’un pays dont le gouvernement prétend être le champion de la lutte contre le terrorisme.

mercredi 11 juillet 2007

Guantánamo Bay, 11 juillet 1962 : qui a assassiné Rodolfo Rosell ? Il y a 45 ans, l’assassinat d’un humble pêcheur











PAR LISANKA GONZALEZ SUAREZ, Granma international

LES recherches concernant le pêcheur Rodolfo Rosell se sont achevées le 14 juillet 1962 quand ses camarades de la coopérative de pêche et les garde-côtes cubains l’ont découvert mort dans son bateau Las dos hermanas.
Sur la poupe de l’embarcation son cadavre était veillé par son chien fidèle, qui ne cessait d’aboyer. On a appris plus tard qu’il était mort des suites d’une hémorragie intracrânienne, provoquée par trois coups énormes sur la tête, mais son corps présentait aussi des blessures causées par un instrument tranchant, ce qui démontrait qu’il avait été torturé.
Qui était ce pêcheur ? Pourquoi un tel acharnement ?
Rodolfo Rosell Salas était un homme sans histoires de 29 ans, père de deux enfants et d’un troisième en route, qui travaillait durant la journée comme employé dans la coopérative de pêche Gustavo Fraga et qui partait en mer chaque nuit pour pêcher. C’était un bon travailleur et il avait rejoint les Milices nationales révolutionnaires de son centre.
Rosell n’ignorait pas le danger que représentait la traversée du canal d’entrée de la baie de Guantánamo, car d’après son épouse, on avait déjà tiré sur lui une nuit. Dans la soirée du 11 juillet 1962, comme tant d’autres fois, il a quitté sa femme et ses enfants ; aucun d’entre eux ne soupçonnait qu’ils ne se retrouveraient plus jamais. « Ca été très dur, et pire encore pour les enfants, car ils ont été privés de la chaleur paternelle », se rappelle sa veuve avec amertume.
Des documents de l’époque témoignent que son enterrement a constitué une grande manifestation de deuil à Caimanera, en même temps qu’un rejet énergique de la barbarie nord-américaine de la part du peuple cubain.
Six jours après sa mort, naissait son troisième enfant, Reina (Oh père ! ils n’ont eu aucune pitié pour toi, et j’ai vécu sans t’avoir connu mon père ! écrirait l’enfant quelques années plus tard).
A cette date le gouvernement de l’île avait déjà déclaré publiquement sa décision de suivre la voie du socialisme, les grands monopoles nord-américains établis à Cuba avaient été nationalisés, l’invasion de Playa Giron avait été écrasée, plusieurs plans d’assassinat du chef de la Révolution cubaine avaient été déjoués, parmi de nombreuses autres tentatives d’intimidation.
Parallèlement, quelques jours auparavant des terroristes cubains avaient perpétré plusieurs actes de sabotage non seulement dans le but de terroriser le peuple cubain mais aussi de justifier leur salaire qu’ils recevaient de la CIA. Ils choisissaient presque toujours les cibles les plus vulnérables : un mitraillage contre une automobile sur la route, une attaque contre une famille paysanne, et maintenant, l’assassinat d’un humble pêcheur de Caimanera, une cible idéale pour leurs grands projets.
Rodolfo Rosell ne serait pas la seule victime à cet endroit du territoire, il y eut aussi le pêcheur Ruben Lopez Sabariego ainsi que les soldats de la brigade de la frontière Ramon Lopez Peña et Luis Ramirez Lopez. La mort les a tous fauchés sur ce morceau de terre de l’île que les Etats-Unis occupent contre la volonté de Cuba et qui constitue toujours un antre de la mort.
Depuis l’assassinat du pêcheur Rosell 45 ans sont passés et sa famille attend toujours que justice soit rendue. Tandis que les assassins se promènent comme des héros sur le territoire d’un pays dont le gouvernement prétend être le champion de la lutte contre le terrorisme.

mercredi 18 avril 2007

Drôle d'échange

Selon un accord signé à Washington la semaine dernière, les demandeurs d'asile expédiés par l'Australie au camp de rétention de Nauru pourraient être transférés aux Etats-Unis. Les réfugiés cubains détenus par les Américains à Guantánamo Bay pourraient être accueillis en Australie. Cet accord d'échange de réfugiés porte sur un maximum de 200 demandeurs d'asile par an pour les deux pays. Selon le ministère australien de l'immigration, cet échange de réfugiés est un message de dissuasion sans équivoque adressés aux trafiquants de réfugiés clandestins et permettra d'assurer un programme d'immigration plus ordonné.L'opposition n'est pas du tout de cet avis et affirme que le nombre de bateaux de réfugiés à destination de l'Australie va en fait augmenter. Le chargé de l'immigration du Parti travailliste, Tony Burke, est persuadé que les demandeurs d'asile vont se dire : « Pour aller aux Etats-Unis, il faut maintenant passer par l'Australie via Nauru. »

vendredi 9 mars 2007

Aveux fracassants de Condoleezza Rice : » Nous nous savons profondément imparfaits »

Les Etats-Unis ont reconnu pour la première fois des imperfections en matière de respect des droits de l'Homme, notamment dans leur réponse aux attentats du 11 septembre 2001. Cet aveu émane d'un rapport annuel sur le sujet publié par le département d'Etat.
"Nous ne publions pas ces rapports parce que nous nous considérons comme parfaits, mais parce que nous nous savons profondément imparfaits", a souligné la secrétaire d'Etat américaine, Condoleezza Rice, en présentant ce rapport. "Notre système démocratique doit rendre des comptes, mais il n'est pas infaillible", a ajouté la chef de la diplomatie américaine. Elle n'a pas précisé les imperfections des Etats-Unis mais son adjoint chargé des droits de l'Homme, Barry Lowenkron, a donné des précisions lors de la conférence de presse.
Il a clairement fait allusion aux critiques que l'administration Bush s'est attirée dans sa "guerre contre le terrorisme", notamment sur le centre de détention militaire de Guantánamo , à Cuba. "Nous reconnaissons publier ce rapport à un moment où notre propre bilan et les mesures que nous avons prises pour répondre aux attentats terroristes contre nous, sont mis en doute", a déclaré M. Lowenkron.
Les Etats-Unis ont été largement critiqués, notamment par le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU, pour le traitement des prisonniers du camp de Guantánamo , où sont détenus sans procès plusieurs centaines de suspects de terrorisme arrêtés depuis la guerre en Afghanistan à la fin de 2001.
Leur pratique des "renditions", les enlèvements de militants islamistes soupçonnés de terrorisme et renvoyés dans des pays tiers où ils risquent la torture, ainsi que l'existence supposée de prisons secrètes de la CIA dans des pays amis pour abriter, voire torturer, des prisonniers soupçonnés de terrorisme, ont également été dénoncées.
Le rapport annuel sur les droits de l'Homme du département d'Etat énumère une "liste noire" de huit pays dans lesquels le pouvoir est resté en 2006 "concentré entre les mains de dirigeants n'ayant aucun compte à rendre": la Corée du Nord, la Birmanie, l'Iran, le Zimbabwe, Cuba, la Chine, le Bélarus et l'Erythrée.

Lire l’introduction du rapport en français
Source : ats , 6 mars 2007

dimanche 28 janvier 2007

Guantánamo se prépare pour un exode massif des Cubains

Si un exode massif se produit après le décès de Fidel Castro, les Cubains interceptés en haute mer seraient probablement envoyés à la base navale de Guantánamo.
Le commandement militaire de la base de Guantánamo (Cuba) a commencé à planifier une possible exode en provenance de Cuba, avec la possibilité d'héberger temporairement les candidats à l'exil, bien que séparés des suspects soupçonnés d'appartenir à al-Qaida. Presque tous les prisonniers (près de 400 étrangers suspectés de terrorisme), capturés après les tentatives du 11 septembre le 2001, se trouvent dans la base depuis le 11 janvier 2002 sans avoir comparu devant un juge. Une soudaine exode d'émigrants cubains en direction des Etats-Unis pourrait de nouveau voir Guantánamo servir à son affectation des années 90, quand quelques 40.000 Haitiens et Cubains ont été internés dans la base après avoir été capturés en haute mer. Mais cette fois l'opération risque d'être beaucoup plus difficile. Dans les années 90, Guantánamo, qui occupe une surface de 117 kilomètres carrés de terre et eaux territoriales, était une base navale tranquille avec plein d'espace. Maintenant, une grande partie de cet espace est occupé par le Camp Delta - la prison des islamistes. Les Etats-Unis devront augmenter le personnel sur la base pour la sécurité, en plus de stocker davantage d'aliments, la plupart arrivant par mer toutes les deux semaines. En 1998, la loterie (baptisée el bombo par les Cubains de la rue), organisée par les services consulaires américains pour filtrer l'afflux de candidats désireux d'obtenir un des 20 000 visas accordés chaque année, a enregistré plus de 500000 demandes. Castro, n'a pas été vu en public depuis qu'il a transféré temporairement le pouvoir en juillet à son frère Raúl , ministre de Défense, pour être opéré des intestins. Le journal madrilène El Pais a affirmé cette semaine que le président cubain se trouve dans un état "très grave" et qu'il souffre de péritonite suite à des complications de trois opérations auxquelles il a été soumis.
D’autre part, Washington voudrait également que le Canada accepte de recueillir une quarantaine de réfugiés cubains actuellement hébergés à Guantánamo . Le message a été transmis cette semaine aux responsables de l'immigration et des affaires étrangères du Canada à Ottawa par la sous-secrétaire d'État américaine Ellen Sauerbery. Les responsables canadiens ont indiqué qu'aucune décision n'avait été prise. Les réfugiés cubains ont été secourus en mer par la garde-côtière américaine alors qu'ils tentaient de fuir leur pays. Mme Sauerbery a d'autre part affirmé que les USA s'attendent à une nouvelle vague d'immigration cubaine dès que le président Fidel Castro aura rendu l'âme.

dimanche 9 mai 2004

Guantanamo, un défi mondial, un enjeu planétaire

par Fausto Giudice*, Genève, 8 mai 2004
Intervention à la conférence : « Guantanamo : Prisonniers sans droit, le droit prisonnier?», organisée par le groupe des juristes de le section suisse d’Amnesty International.

Chers amis,
Je tiens tout d’abord à remercier Amnesty International de m’avoir invité, non pas tant parce que cela signifie une reconnaissance du travail de fourmi que mène le Collectif guantanamo, créé en février 2003 en France, mais par l’occasion que cela donne d’engager un dialogue avec vous, avec des personnes physiques, ce qui nous change un peu du dialogue par écrans interposés, dans le “monde virtuel”. Répondant à la demande des organisateurs, j’avais préparé une intervention calibrée pour ne pas dépasser 20 minutes. Mais les événements des derniers jours - le “scandale” des photos d’Abou Ghraïb en Iraq - me conduit à faire quelques remarques préliminaires non-prévues.
Je commencerai par une blague : Savez-vous quelle est la différence entre guantanamo et Abou Ghraïb ? Eh bien, à guantanamo, le personnel militaire n’a pas le droit d’introduire des appareils photo numériques. Le général Geoffrey Miller s’est bien chargé de mettre en place des dispositifs de surveillance interne pour éviter toute fuite. C’est ce même Geoffrey Miller qui a été chargé des prisons US en Iraq. Son mot d’ordre est un néologisme : il faut, dit-il, “gitmo-ize” - “guantanamoïser” les prisons en Iraq.
Qui est Miller ? C’est un général de 54 ans, ancien parachutiste, Texan. Il a été responsable du camp de guantanamo d’octobre 2002 à mars 2004. En 18 mois, il a mis au point un système carcéral performant, qu’il considère comme un “modèle” et un “laboratoire”. Il est désormais charger d’appliquer ce modèle en Iraq. Un modèle qui se résume à “surveiller, punir et...interroger”.
Miller a été nommé à guantanamo après des cafouillages sévères dans la direction du camp. Le premier commandant du camp n’a été en poste que de janvier à octobre 2002. C’est que ce général de réserve, spécialiste du renseignement militaire, avait un petit défaut : il était aussi docteur en droit et avocat dans le civil. Un juriste donc. Et ce général Michael Dunlavey, au bout de quelques mois, au vu des résultats des interrogatoires des prisonniers, a pris un coup de sang. Il a donc pris l’avion pour Bagram, en Afghanistan, la base militaire US près de Kaboul d’où étaient envoyés les prisonniers à guantanamo, et il est allé passer un savon aux gens de la CIA en leur disant : «Mais arrêtez donc de nous envoyer des Mickey Mouse ! Il n’y a pas un seul terroriste là-dedans !»
Exit donc Dunlavey. Avec son successeur, Rick Baccus, ce sera encore pire : ce général de la Garde nationale de Rhode Island s’est fait tout de suite mal voir en montrant du respect aux détenus, qu’il saluait par “Salam Aleikum”. Il a aggravé son cas en demandant à la Croix-Rouge d’afficher dans le camp des affiches indiquant aux prisonniers quelles étaient leurs obligations en tant que prisonniers de guerre : ils n’étaient obligés de déclarer que le leur nom, lieu et date de naissance et numéro matricule, rien de plus. Baccus croyait que les “combattants ennemis illégaux” étaient des prisonniers de guerre. Il avait tout faux !
Exit donc Baccus et arrive Miller. Miller installe un système de sécurité et de contrôle des prisonniers, fondé sur un système de punitions e(t de récompenses, qui vont d’un Twinkie ou un Happy meal jusqu’au transfert dans des dortoirs d’une dizaine de prisonniers. Il met au point le modèle de guantanamo, effcacement secondé par son bras droit, qui s’appelle - cela ne s’invente pas - Adolf...McQueen ! Maintenant qu’il est attelé à appliquer le modèle guantanamo en Iraq, c’est le général Jay Hood qui a pris la relève, continuant sur la lancée de Miller à guantanamo même.
Ces remarques faites, j’en viens à mon intervention.
Comme je crois qu’il y a suffisamment d’intervenants hautement qualifiés à cette tribune pour parler de guantanamo du point de vue du droit, je vais donc essayer de faire une série de remarques à partir d’une triple approche : politique, stratégique et historique.
Je crois qu'il est nécessaire de situer guantanamo dans l’espace et dans le temps pour bien comprendre à quoi exactement nous avons affaire.
Tout d’abord une définition de guantanamo; c’est celle donnée par le Collectif guantanamo dans son appel fondateur de février 2003. guantanamo, c’est le premier camp de concentration off shore de l’Empire.
Les quatre termes sont également importants :
- camp de concentration d’abord : guantanamo s’inscrit dans une lignée qui va des camps de prisonniers sudistes des Confédérés durant la Guerre de sécession aux camps d’internement des citoyens US d’origine japonaise pendant la deuxième guerre mondiale, en passant par les camps de concentration britanniques pour les Boers en Afrique du Sud au début du XXème siècle ou pour les Malais en Malaisie pendant les années 40, sans oublier bien sûr les camps nazis et l’archipel du goulag soviétique. guantanamo est donc une sorte de condensé historique de toute l’expérience de l’enfermement concentrationnaire en même temps qu’il est un laboratoire d’expérimentation de nouvelles méthodes, adaptées à la situation du XXIème siècle.
- Premier camp de concentration off shore ensuite. Off shore, c’est le terme qu’on utilise pour les plateformes pétrolières en mer et ça signifie : extraterritorial. Tous les autres camps de concentration se trouvaient toujours sur un territoire juridiquement défini, en général un territoire national ou un territoire annexé comme la Pologne occupée par les nazis. Et tous les camps avaient en général, du moins formellement, des structures et des instances juridiques internes et même dépendaient d’instances juridiques formelles, même si cela ne changeait pas grand chose au sort des prisonniers. Avec guantanamo, on assiste à l’invention d’un système carcéral échappant à toute juridiction. En somme, on est sur la lune...
- Premier camp de concentration off shore de l’Empire enfin. Oui, c’est l’aspect le plus frappant de guantanamo. Voilà des citoyens originaires de 42 pays de toute la planète capturés en Afghanistan, au Pakistan, en Gambie ou ailleurs par des soldats et des policiers venus des USA et déportés à 24 heures d’avion de là, dans les Caraïbes. La dimension planétaire du phénomène est évidente. Planétaire et impériale. À guantanamo, un pays membre de l’ONU sur cinq est représenté. guantanamo est la première prison mondialiste d’un Empire qui a une ambition de domination mondiale.
Dans les années 70, à l’époque de la bande à Baader et des Brigades rouges, certains fonctionnaires allemands avaient conçu un projet qui avait été repoussé avec une certain répulsion par leurs collègues européens : construire une prison centrale européenne de haute sécurité pour les terroristes de tous les pays du Marché commun, comme on disait alors. Le projet avait été rapidement abandonné. Aujourd’hui, guantanamo incarne le pire cauchemar paranoïaque que l’on puisse imaginer.
Mais guantanamo n’est que la pièce centrale d’un dispositif planétaire que nous avons baptisé la galaxie guantanamo. Comme l’archipel du Goulag, la galaxie guantanamo a de nombreuses filiales et succursales. Les unes sont gérées directement par l’Empire yankee, les autres sont gérées par les alliés et les marquis - c’est-à-dire les administrateurs des marches de l’Empire.
Dans la première catégorie, il faut citer la base aérienne de bagram, près de Kaboul, où sont détenus un nombre inconnu de “combattants ennemis étrangers illégaux”. Et puis, il y a Diego Garcia, une île de l’Océan Indien louée par les Anglais à l’US Army, qui en chassée les 2 000 habitants. À Diego Garcia sont sans doute détenus des “gros poissons” capturés en Afghanistan et au Pakistan. Et on est en droit de supposer que d’autres centres de détention clandestins sont disséminés dans les bases militaires US de par le monde.
Dans la deuxième catégorie, on peut citer la prison anglaise de haute sécurité de Belmarsh, où sont détenus depuis plus de 2 ans 12 étrangers musulmans sans être inculpés et privés de tout droit. 2 autres détenus, un Libyen et un Algérien ont pu enfin sortir récemment de ce guantanamo anglais. On peut encore citer la prison du Cygne blanc, dans la région russe de Stavropol, où sont détenus 7 des 8 détenus russes de guantanamo livrés à la Russie, ou encore les prisons de Malaysia, où sont détenus sans inculpation depuis 2 ans plus de 80 suspects de terrorisme.
guantanamo est le centre d’une toile d’araignée qui s’étend sur toute la planète.
Ses fonctions sont multiples :
La première fonction est la propagande de la terreur. guantanamo comme menace pour tous les enfants turbulents du Sud de la planète : “si tu n’es pas sage, je t’envoie à guantanamo”.
La deuxième fonction est le dressage. Le système carcéral adopté à guantanamo a pour objet de transformer des hommes musulmans, maigres, barbus, jugés fanatiques, solidaires entre eux, forcément ignorants et mal élevés puisqu’ils ne parlent même pas l’anglais, bref sauvages en bonshommes obèses, individualistes, amateurs de hamburgers, de coca-cola, de musique rock et de pin-ups pour calendriers de camionneur et bien sûr disposés à dénoncer leurs frères, en un mot en consommateurs modèles de l’american way of life. Les prétendus talibans doivent devenir des Mister Smith, des hommes nouveaux de l’Empire. On n’a pas cherché à les convertir en presbytériens, baptistes, méthodistes ou épiscopaliens mais cela ne saurait tarder.
La troisième fonction est l’expérimentation de nouvelles méthodes d’enfermement, de disciplinage, d’interrogatoire et, il faut le dire, de torture. C’est la dimension laboratoire. À chaque nouvel ennemi, le système impérial US a cherché à trouver des nouvelles tactiques de combat militaire, politique, idéologique et policier, donc aussi de nouvelles méthodes pour “surveiller, punir et interroger”.
C’est que guantanamo n’a pas été improvisé, mais pensé et préparé, avant même le 11 septembre 2001 et la guerre contre l’Afghanistan. Utilisée pour concentrer des boat people haïtiens dans les années 90, la base de guantanamo devait accueillir des “réfugiés” ou des prisonniers de la guerre du Kosovo, mais on y a renoncé au dernier moment. Elle devait accueillir des prisonniers faits en Iraq, mais là aussi, on y a renoncé lorsqu’on s’est rendu compte que Saddam Hussein avait préparé sur place un dispositif carcéral amplement suffisant.
Mais la quatrième et principale fonction de guantanamo est celle-ci : c’est un outil stratégique de commandement au service de la diplomatie guerrière de l’Empire. De guantanamo émanent des messages multiples, des directives même aux pays dont des ressortissants sont enfermés.
Citons quelques-uns de ces messages directifs :
1°- Les interrogatoires de tel ou tel de vos ressortissants ont permis d’établir l’existence de tel ou tel réseau terroriste dans votre pays. Nous vous demandons donc avec insistance de sévir contre telle ou telle organisation, telle ou telle personne. Sur la base d’interrogatoires surréalistes, le FBI et la CIA agissent même directement dans une série de pays, supervisant les arrestations. L’exemple le plus massif est le Pakistan, le plus meurtrier est le Yémen.
2° - Deuxième message aux pays dont des ressortissants sont détenus à guantanamo : si vous collaborez avec nos projets impériaux, on pourra éventuellement vous rendre vos détenus. C’est ce qui s’est passé avec une série de pays, qui ont pu récupérer certains de leurs ressortissants (Pakistan, Afghanistan, Arabie saoudite, Soudan, Danemark, Grande-Bretagne, Tadjikistan, Algérie entre autres). Colin Powell a envoyé un tel message à la France, la semaine dernière depuis Copenhague. Il a dit à mots couverts ceci : si la France accepte d’envoyer des troupes en Iraq, ne serait-ce que pour protéger la mission de l’ONU, les sept détenus français pourraient être libérés.Ainsi donc, les détenus de guantanamo jouent à leur corps défendant le rôle d’ambassadeurs si l’on se souvient que les ambassadeurs, historiquement, étaient des otages.
Désormais, guantanamo, auparavant connu à cause d’une célèbre chanson cubaine, est devenu un gros mot. Je citais le cas de Belmarsh, baptisé le guantanamo anglais. Je pourrais citer le local 1391, cette prison clandestine israélienne où sont détenus des Palestiniens et des Libanais, qui a été immédiatement baptisée le guantanamo israélien par les médias israéliens lorsqu’ils ont découvert son existence l’année dernière.
Rappel historique
Je passe maintenant au rappel historique qui me semble très pertinent pour replacer guantanamo.
Il touche à l’origine même de guantanamo, qui est un souvenir vivant du Premier Empire yankee.
En février 1903, le président Theodore Roosevelt signe avec le premier président cubain, Thomas Estrada Palma - qui était également citoyen des USA - un accord pour la « cession de terrains pour l’établissement de dépôts de charbon et de bases navales » à Bahia Honda et à guantanamo. Bahia Honda ne vit jamais le jour mais guantanamo devint une base navale permanente. L’accord, confirmé en juillet 1903, stipulait effectivement qu’il ne pouvait être rompu que par décision conjointe des deux signataires : la République dépendante de Cuba autorisait par là les forces navales des USA à stationner sur une portion de son territoire autant de temps que l’Empire l’estimait nécessaire. Et la nécessité devint d’autant plus durable que la « diplomatie de la canonnière » de Roosevelt Ier créa, quelques mois plus tard, l’État du Panama, jusque-là province des États-Unis de Colombie. Le gouvernement fédéral colombien ayant eu l’insolence de refuser une concession territoriale aux USA, pour la reprise de la construction du canal de Panama, la présidence US se fit l’instigatrice d’une sécession panaméenne. Aussitôt dit, aussitôt fait, la République de Panama était proclamée le 3 novembre 1903. Le 18 novembre, le Panama concédait aux USA, à perpétuité, l'« usage, l'occupation et le contrôle d'une zone de terrains […] pour la construction, l'entretien, l'exploitation, l'assainissement et la protection du dit canal. » La mer des Caraïbes devenait un point de passage direct entre l’Atlantique et le Pacifique : l’intérêt stratégique de la base navale de Guantanamo prenait une ampleur qui ne souffrait plus aucune contestation.
Mais il est fort utile de rappeler les circonstances historiques qui ont permis aux USA d’établir leur contrôle sur Cuba. Pour cela, il faut revenir quelques années en arrière.
En 1895, le Parti révolutionnaire cubain relance la guérilla contre l’Espagne, puissance coloniale. Ne parvenant pas à venir à bout de l’insurrection, la Couronne espagnole passe la main aux USA. On assiste alors à une mise en scène magique : le 15 février 1898, le navire cuirassé USS Maine de la flotte yankee explose en rade de La Havane, tuant les 268 hommes d’équipage, à l’exception notable de l’ensemble des officiers, tous invités, précisément ce soir-là, à un dîner en ville. L’explosion fut présentée par le gouvernement et les médias yankees comme une attaque espagnole. En 1975, une enquête de l’armée US conclut pourtant que la cause la plus probable était une explosion provenant de l’intérieur même du Maine. La thèse officielle privilégia alors l’hypothèse d’une explosion accidentelle de poussière de charbon dans une soute localisée près de la salle des munitions. Quelques 105 années plus tard, l’autre hypothèse - plausible bien que non retenue par la commission d’enquête militaire - est celle d’un « attentat » délibérément préparé, ou délibérément laissé préparer (il y a peu de différence), afin de justifier le déclenchement du conflit. Que conclura la commission d’enquête de l’an 2079 sur le 11 septembre 2001 ?
Le 25 avril 1898, répondant aux vœux des grands groupes de presse, des premiers grands trusts industriels et des firmes d’armement, le président McKinley déclare donc la guerre à l’Espagne. Sous le slogan « N’oubliez pas le Maine », l'escadre du commodore Dewey détruit, le 1er mai, la flotte espagnole des Philippines sans perdre un seul homme. Une guerre chirurgicale en somme. Le 3 juillet, c’est au tour de la flotte de l’amiral Cervera – dont le Cristobal Colon ! – d’être coulée, toujours en souvenir du Maine, dans la baie de Santiago de Cuba. Ce fut une véritable « guerre-éclair » : sans avions et sans blindés, 20 000 yankees opposés à plus de 300 000 soldats espagnols obtiennent, en moins de trois mois, la reddition des armées de la régente Elisabeth d’Espagne.
Le Traité de Paris de décembre 1898 organise une simple passation de souveraineté, contre paiement d’une indemnité, entre la Couronne espagnole et le gouvernement des USA sur les îles de Cuba, de Porto-Rico, de Guam et sur l’archipel des Philippines.
Contrairement à l’île de Porto-Rico qui fut annexée pour demeurer sous la tutelle directe du président des États-Unis d’Amérique jusqu’en 1952 et aux Philippines qui ne deviendront indépendantes qu’en 1946, Cuba est placée sous l’administration d’un gouvernement militaire d’occupation. L’armée yankee remplace l’armée espagnole, avec la même mission à remplir : mettre un terme à la Révolution cubaine. Le gouvernement militaire US se consacre au remplacement de l’Armée de libération par une garde rurale qu’il pouvait aisément contrôler et à l’élimination de l’« Assemblée représentative du peuple cubain armé », qui administrait les territoires libérés de l’occupation espagnole. Ce n’est qu’une fois cette politique contre-révolutionnaire appliquée par son armée d’occupation que le gouvernement yankee consentira à envisager la possibilité d’une république cubaine.
Une assemblée constituante est élue en novembre 1900, et la constitution de la République de Cuba votée en février 1901. Le peuple cubain s’étant doté d’une constitution lui permettant d’exercer sa souveraineté, les troupes yankees pouvaient évacuer l’île avec le sentiment du devoir accompli : la puissance coloniale européenne avait cédé la place à une nouvelle république américaine. Mais tel n’était pas le souhait de l’Empire.Le 27 février 1901, l'amendement proposé par le sénateur Orlando Platt est adopté par le Sénat US : son article 3 édicte que le gouvernement cubain autorise les USA à « intervenir en faveur de la sauvegarde de l’indépendance cubaine et du maintien d’un gouvernement attaché à la protection de la vie, de la propriété et de la liberté individuelle ».
Afin de permettre l’exercice de ce « droit d’intervention », l’article 7 prévoit que les USA pourront acquérir ou louer auprès du gouvernement cubain des terrains servant à « l’établissement de dépôts de charbon et de bases navales en certains points qui seront déterminés avec le Président des USA. »Surtout, et c’était là la mesure la plus destructrice de la souveraineté cubaine, l’amendement Platt proclamait que le président US ne laisserait « le gouvernement et le contrôle de l’île » au peuple cubain qu’à condition que l’amendement lui-même, voté par une institution yankee, soit « partie intégrante » de la constitution de la République de Cuba.
C’est Theodore Roosevelt qui mettra en application ce que prévoyait l’amendement Platt. Theodore Roosevelt avait préparé la guerre contre l’Espagne en tant que secrétaire adjoint à la Marine. Il était devenu vice-Président par l’utilisation médiatique de son engagement à Cuba où il incorpora des reporters au sein de son corps de volontaires, les Rough Riders (les « Rudes Cavaliers ») . L’assassinat de Mc Kinley lui permettra d’accéder à la présidence.
Roosevelt II (Franklin Delano) confirmera par le traité de 1934, qu’il n’y aurait pas de « nouvelle donne » (new deal en anglais) concernant Cuba : les limites territoriales de la base de Guantanamo demeureraient « aussi longtemps que les USA n’abandonneront pas la dite base navale ». La Deuxième Révolution cubaine de 1959 et la contestation par le gouvernement castriste de l’atteinte à la souveraineté du peuple de Cuba n’entama pas l’existence de la plus ancienne base outre-mer de l’Empire. Tout au plus, la base fut aménagée pour devenir autosuffisante en eau grâce à une usine de désalinisation, devenant plus totalement encore une enclave US sur le sol cubain.
Et c’est cette enclave qui a servi de laboratoire d’essai au Premier Empire yankee (1898-1941) avant que les bases militaires se multiplient et soient disséminées aux différents points stratégiques du Deuxième Empire (1941-2001) et du Troisième Empire (2001-…). Là est le lien entre Guantanamo et l’histoire de l’Empire yankee : c’est à guantanamo que le modèle impérial a été testé.
Quel est le modèle de domination impériale yankee ? Il peut être résumé en un schéma simple : « attentat » -> guerre -> occupation -> bases militaires. Ce schéma peut être développé ainsi :
• Un « attentat » vise une cible US, la plus symbolique possible (selon le contexte historique) afin de marquer l’opinion publique des citoyens US, et pourquoi pas l’opinion mondiale ;
• Le gouvernement US, au nom du droit de la victime à se défendre contre une agression (et sans attendre les résultats d’une quelconque enquête), déclare la guerre à un État qui fait obstacle aux Droits de l’Homme ainsi qu’aux intérêts de l’Empire (cette confusion entre les droits de l’humanité et les impérieux intérêts de l’Empire n’est-elle pas la preuve qu’il s’agit là de l’Empire du Bien ?) ;
• Les armées de l’Empire remportent une victoire par capitulation qui leur permet d’occuper le pays vaincu et d’y installer un gouvernement sensible aux intérêts yankees ;
• Ce gouvernement mis en place par l’armée d’occupation s’empresse de céder aux USA, afin que ceux-ci protègent l’indépendance du peuple fraîchement libéré (car les USA, comme Napoléon Ier, n’entreprennent que des guerres de libération), des bases militaires pour une durée proche de la permanence.
Par une répétition qui doit nous interroger, c'est ce schéma grossier de domination qui a été suivi lors des trois vagues d’expansion impériale yankee :
• L’explosion du Maine a justifié l’invasion de Cuba et des Philippines et l’élimination de leurs mouvements révolutionnaires, l’imposition de l’amendement Platt à Cuba, l’ouverture de l’économie cubaine aux capitaux yankees et l’établissement de la base de guantanamo ;
• L’attaque du 7 décembre 1941 sur Pearl Harbor a permis une vaste offensive dans le Pacifique, l’élimination de la concurrence de l’Empire nippon, son remplacement par une « démocratie industrieuse » et l’utilisation du Japon comme base de contrôle et de surveillance face à la Chine communiste. Remarque en passant sur Pearl Harbor : L’attaque a, encore récemment, suite aux attentats du 11 septembre 2001, été présentée comme un « attentat » dans le sens où il se serait agi d’une attaque surprise puisque l’Empire nippon n’avait pas déclaré la guerre à l’Empire yankee.
L’argument doit être sérieusement réexaminé lorsque l’on sait que le gouvernement US avait mis en place, à l’été 1941, un embargo total sur l’approvisionnement japonais en fer et en pétrole ; des mesures que Radhabinod Pal, un des juges au procès pour crimes de guerre des responsables japonais, en désaccord avec le verdict final, estima être « une menace claire et réelle pour l’existence même du Japon ». En réalité, le gouvernement US avait prévu, et voulu, cette guerre : l’attaque aérienne contre la base hawaiienne lui permit de faire basculer l’opinion publique jusque-là opposée au déclenchement de toute hostilité. Pearl Harbor offrit également l’occasion de créer un gigantesque complexe militaro-industriel qui permit aux forces US d’intervenir simultanément dans le Pacifique, en Afrique du Nord et en Europe au cours de la seconde guerre mondiale et de s’imposer comme le seul empire capitaliste – le 2e Empire yankee – face à l’Empire soviétique.
Enfin, il faut se rappeler que l’attaque sur Pearl Harbor eut lieu sous la présidence de Franklin D. Roosevelt, cousin de Théodore Roosevelt et, comme lui, ancien Secrétaire adjoint à la Marine. Elle servit également de justification à l’internement de plusieurs dizaines de milliers de citoyens US d’origine japonaise dans des camps de concentration.
• On observe un mécanisme similaire dans le déclenchement de l’intervention militaire US au Vietnam. Entre le 2 août et le 4 août 1964, deux destroyers US, le Maddox et le Turner Joy, qui se sont aventurés dans les eaux territoriales du Nord-Vietnam, essuient des tirs de la part des Nord-Vietnamiens. C'est du moins ce qu'affirment les services secrets de Washington (les équipages des navires concernés nieront plus tard la réalité de cette agression). Cet incident du golfe du Tonkin fournit au président Johnson le prétexte à une intervention militaire. Il lance dès le 4 août les premiers raids sur les positions communistes au Sud-Vietnam et, le 7 août, il obtient du Congrès les pleins pouvoirs militaires pour un engagement contre le Nord-Vietnam. Le 7 février 1965, l’aviation US commence à bombarder le Nord-Vietnam. On connaît la suite : 10 ans de guerre et le plus grand échec de toute l’histoire impériale des USA.
• Enfin, les attentats du 11 septembre 2001, ont justifié – pour l’heure - l’invasion de l’Afghanistan et de l’Iraq, l’élimination de deux régimes qui refusaient de céder à l’Empire sur la question d’un oléoduc pour les Talibans et des deuxièmes réserves mondiales de pétrole pour Saddam Hussein, la mise en place de gouvernements aux ordres à Kaboul et à Bagdad (lorsqu’aura cessé une période d’administration militaire US qui pourrait durer de quelques mois à plusieurs années) et l’établissement ou le renforcement de multiples bases militaires en Asie centrale et au Proche-Orient.
Voilà ce que je tenais à dire pour tracer un cadre général dans lequel replacer le défi mondial constitué par guantanamo. J’ai voulu ainsi vous donner une idée de la philosophie générale qui motive le Collectif guantanamo. Et je conclurai en rappelant que seules des multitudes humaines colorées, éclairées et organisées peuvent faire échec à l’Empire et à son goulag tropical. Je pense que nous aurons à débattre de cet aspect de la problématique qui nous réunit.

* Président du Collectif guantanamo, France.