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jeudi 25 octobre 2007

Lotfi Lagha : 3 ans de prison – Salah Sassi : 11 ans

Lotfi Lagha, un ancien détenu tunisien de la prison américaine de Guantanamo, a été condamné mercredi à trois ans de prison ferme pour "association de malfaiteurs projetant des agressions contre des personnes et des biens" dans le cadre d'un projet terroriste.
Ce jugement a été rendu mercredi soir par la Chambre criminelle du tribunal de première instance de Tunis, qui a aussi condamné par défaut à onze ans de prison un autre accusé, Salah Sassi, actuellement encore détenu par les Etats-Unis à Guantanamo (Cuba).
Lotfi Lagha, 40 ans, avait demandé son acquittement et nié les accusations selon lesquelles il a combattu sous les ordres du régime taliban en Afghanistan ou avoir projeté des actes terroristes en Tunisie et à l'étranger.
Selon un de ses avocats, Samir Dilou, Lotfi devait être remis en liberté immédiatement, puisqu'il a déjà été emprisonné durant cinq ans à Guantanamo.
Incarcéré depuis son rapatriement le 18 juin 2007, il a été accusé d'avoir servi sous les ordres des talibans contre l'Alliance du Nord du commandant Shah Massoud. Il s'est aussi vu reproché des activités de maniement d'armes, d'apprentissage aux techniques de la guérilla et de recrutement pour le compte du régime fondamentaliste au pouvoir à Kaboul (de 1996 à 2001).
Mercredi, il est revenu sur des aveux. "J'avais fait ces déclarations sous la pression. J'étais menotté et j'ai eu peur", avait-t-il affirmé au tribunal.
Jugé par contumace, Salah Sassi, originaire de Menzel Bourguiba (nord), a été, quant à lui, lourdement condamné pour adhésion à Al-Qaïda d'Oussama Ben Laden.
Inculpé d'"incitation à des crimes terroristes, entraînements militaires et adhésion à une organisation terroriste opérant hors du territoire tunisien", Salah Sassi, 34 ans, a également écopé de dix mille dinars d'amende (6.000 euros environ).
Lotfi Lagha avait été rapatrié par les Etats-Unis le 18 juin dernier en même temps qu'un autre ex-détenu, Abdallah Ben Amor El Hajji , qui doit être jugé fin octobre par la justice militaire.
Les associations américaine, Human Rights Watch (HRW), et britannique, Reprieve, parrainent ces deux ex-détenus de Guantanamo, une juge fédérale américaine ayant récemment interdit le rapatriement de Mohammed Rahman, un troisième Tunisien, qui redoute d'être maltraité.
Les autorités tunisiennes ont réfuté de nouveau mercredi "les allégations de mauvais traitements" et affirmé que les deux Tunisiens rapatriés sont assurés de "toutes les garanties d'un procès équitable".
Source : AFP, 24 octobre 2007

vendredi 12 janvier 2007

Guantanamo, cinq ans de «routine hideuse» : Les avocats de deux Tunisiens emprisonnés depuis 2002 témoignent des conditions de détention sur la base

Par Philippe GRANGEREAU, Libération, 10 janvier 2007
Le professeur Mark Denbeaux et son fils Josuah, tous les deux avocats à Newark, ont pris en 2005 la défense de deux «combattants illégaux» tunisiens détenus à Guantanamo : Rafik al-Hami et Mohammed Rahman. «Ils ont été transférés à Guantanamo probablement à la fin de l'année 2002. Mais ils n'en sont pas sûrs car il est impossible à quelqu'un placé en isolement d'avoir la notion du temps», expliquent les avocats. Ils ne peuvent pas parler à leurs clients au téléphone, mais ils leur ont rendu visite en août 2005 et en juin 2006.

«Seigneur». «La première fois que nous les avons vus, l'un comme l'autre étaient enchaînés au sol de la pièce destinée aux entretiens. C'était pathétique. Une caméra filmait notre conversation. Les gardes nous ont assuré qu'ils n'enregistraient pas le son, mais cela reste à démontrer.» «Nous savons peu de chose sur eux... Nos clients ne nous font pas confiance. C'est dur de leur parler. Il est presque impossible de les convaincre que nous allons les aider en agissant contre notre gouvernement.» Mohammed Rahman, selon ses avocats, a été vendu à l'armée américaine (qui offrait des récompenses) «par une sorte de seigneur de guerre pakistanais». Il a des problèmes cardiaques qui, selon ses défenseurs, ne sont pas soignés. Il a été déclaré «ennemi combattant» car il aurait été en contact avec une personne «terroriste» ou «qui devrait être considérée comme un "combattant ennemi"», selon les autorités. «Le gouvernement est convaincu que Rahman n'est pas un "combattant ennemi", mais il le garde parce qu'il ne sait pas quoi faire de lui», affirme Josuah Denbeaux. Rahman refuse d'être rapatrié en Tunisie. «C'est un homme brisé, qui a perdu tout espoir. La première fois que nous l'avons vu, il était content. Même s'il nous considérait sans doute comme des interrogateurs, la conversation que nous avons eue avec lui rompait avec la routine hideuse de sa détention. J'ai réussi à le faire rire en lui rapportant la mise en garde que je venais de recevoir d'un lieutenant. Celui-ci m'avait affirmé qu'il était courant de voir les prisonniers jeter leurs excréments à la face de leurs interlocuteurs. Ce mensonge était si débile qu'il a éclaté de rire. Mais lors de notre dernière visite; en juin 2006, Rahman ne nous regardait pas et ne voulait pas parler.» Rafik al-Hami était, quant à lui, détenu dans une prison en Iran, avant d'être livré par Téhéran aux autorités américaines, sans doute en 2001. Il aurait été détenu à Kaboul pendant un an. «Il dit avoir été torturé alors qu'il était détenu en Afghanistan, mais il ne sait pas s'il s'agissait de la CIA, de militaires américains, d'employés de compagnies privées employés par l'US Army ou d'Afghans, rapporte Mark Denbeaux. Le gouvernement l'accuse d'une seule chose, d'avoir été dans un camp d'entraînement militaire en Afghanistan sous le régime taliban. Mais cela ne fait pas de lui un terroriste. Et comment le gouvernement a-t-il obtenu cette information ? Qui ont-ils torturé pour obtenir cette information, peut-être fausse ?»
«Découragés». «Bien sûr, ni l'un ni l'autre ne seront jugés. Le gouvernement n'a tout simplement pas la moindre preuve contre eux», estime Josuah Denbeaux. «Nous allons finir par gagner, pense Mark Denbeaux, et j'espère que mes clients vivront jusqu'au jour où ils se verront restituer leurs pleins droits. Les choses avancent lentement et ils sont très découragés. Il est difficile de les convaincre qu'il y a un espoir, au bout de cinq ans de détention et sans promesse du gouvernement qu'ils seront jugés un jour.»
La défense de leurs clients est devenue plus symbolique que réelle depuis qu'une loi adoptée par le Congrès américain, le 28 septembre, interdit aux «combattants illégaux» tout recours devant des tribunaux civils. Ils ne peuvent être jugés que par des instances militaires spéciales, avec l'assistance d'un avocat militaire et, s'ils le souhaitent, d'un avocat privé. A l'instar des autres avocats américains qui représentent quelque 300 détenus de Guantanamo, Mark et Josuah Denbeaux ont fait appel de cette décision devant un tribunal du district de Columbia, et la Cour suprême sera sans doute amenée à statuer. Guantanamo, pour ces deux militants du droit, «est un désastre politique enfanté par nos politiciens, qui ont fait de terribles erreurs et se refusent à l'admettre».
Source : http://www.liberation.fr/actualite/monde/227684.FR.php