Depuis plus de six ans, le journaliste soudanais Sami Al Haj est illégalement détenu dans le camp de concentration de Guantanamo. Aucune charge précise n'est retenue contre lui. Cette situation digne des plus troublants romans de Kafka pourrait laisser songeur, si elle ne témoignait pas, plus simplement, d'une honteuse et intolérable injustice. Ni la première dame de France, ni Reporters Sans Frontières ne s'en émeuvent pourtant (si quand même, un tout petit peu, NDLR chronique de guantánamo)
Quand les États-Unis mènent leur guerre aveugle contre le terrorisme, la liberté de la presse et les droits de l'Homme trinquent. Rappel des faits : en octobre 2001, la chaîne Al Jazeera envoie son cameraman, Sami Al Haj , avec une équipe de journalistes en Afghanistan pour couvrir la guerre de Bush. Après un transit obligatoire au Pakistan, l'équipe obtient enfin un visa d'entrée, mais elle juge utile de prolonger son séjour à Quetta, en raison de la violence du conflit. Sami Al Haj paie aujourd'hui le prix fort de cette précaution qui, pourtant, relève du sens commun. Mais on peut se demander si, dans cette affaire, le bon sens est vraiment la chose au monde la mieux partagée. Quand les forces nordistes, avec l'appui des Américains, l'emportent, l'équipe de journalistes tente de retourner à Kandahar. Elle a, au préalable, prorogé son visa d'entrée. C'est donc au moment de passer la frontière, à la mi-décembre 2001, que les forces armées pakistanaises sur ordre des américains arrêtent Sami Al Haj . Le cauchemar commence. Dénudé, dépouillé de ses effets personnels, la tête couverte, les pieds et les mains enchaînés, le journaliste est jeté dans un avion, en direction de la prison américaine de Bagram en Afghanistan. Ensuite, il sera transféré vers la base de Guantanamo, zone de non-droit toujours active, où il reste à ce jour incarcéré, sans le moindre chef d'inculpation.
Son avocat, Clive Stafford Smith, a déclaré il y a un an que son client avait enduré des tortures et des abus sexuels. Contraint de suivre un traitement pour un cancer de la gorge, les autorités américaines refusent de lui administrer. En revanche, un comité d'experts, nommé le Behavorial Science Consultation Team, emploie toute son intelligence à détruire un homme affaibli, de surcroît innocent. Sami Al Haj rapporte ces châtiments corporels : outre les privations de sommeil et les tortures psychologiques, les détenus subissent des sévices sexuels et des humiliations qui les obligent à uriner ou déféquer sur eux-mêmes. Aspergés de sang menstruel, soumis à des températures extrêmes, ces hommes doivent assister, voire participer, à la profanation de leur livre sacré. Mais Sami-Al-Hajj, qui a non seulement l'outrecuidance d'être musulman, s'avère également être un Noir. Son temps de récréation est, par conséquent, inférieur à celui des détenus blancs.
Selon Stafford-Smith, cette incarcération, dénuée de tout fondement légal et rationnel, répond à une volonté politique : « les Américains ont voulu, sous la menace, faire de lui un informateur censé confirmer des liens de toutes pièces fabriqués entre la chaîne de télévision arabe Al-Jazeera et le groupe Al-Qaïda. » Alternant la carotte (promesse d'accession à la nationalité américaine) et le bâton (menace pesant sur son épouse et sur leur jeune fils), ceux qui interrogent le journaliste se sont heurtés à un refus. « A titre strictement personnel, je ressens de l'admiration pour le courage dont fait preuve Sami Al Haj » observe son avocat. « Il est tout à fait innocent. Aussi terroriste que mon grand-père. La seule raison qui explique un tel traitement, c'est son appartenance à la chaîne d'information Al-Jazeera. »
Vivement critiquée par l'Arabie Saoudite, comme par les États-Unis, celle-ci semble oeuvrer, de quelque façon, en faveur du rapprochement des riches par delà les divergences culturelles. Mais c'est une vertu que nul hélas ne lui reconnaît. On l'accuse de rendre publics les messages des ennemis de la liberté. Mais si la télévision occidentale elle-même répondait à cette injonction extrême, elle serait privée d'information et tout à fait silencieuse. Les dépêches regorgent de crimes inesthétiques ou immoraux dont il faut toutefois rendre compte. La guerre contre le terrorisme seule explique cette volonté de museler une certaine presse, en persécutant des journalistes qui ne font que leur travail. Stafford Smith déplore que les associations et les médias occidentaux soient si peu sensibles à la souffrance de Sami Al Haj qui découle du mépris pour les droits de l'Homme et pour la liberté de l'information. Pourtant, il est à noter qu'une pétition circule sur internet, à l'initiative d'Amnesty International (Groupe 54 d'Ottignies-Louvain-La-Neuve). Ce ne sera sans doute pas assez pour que s'achève ce long périple au bout de l'enfer de la cellule 345 qui est aussi, pour tout citoyen soucieux du respect des droits de l'Homme, un voyage au bout de la honte.
Source : najzoug@yahoo.fr
Quand les États-Unis mènent leur guerre aveugle contre le terrorisme, la liberté de la presse et les droits de l'Homme trinquent. Rappel des faits : en octobre 2001, la chaîne Al Jazeera envoie son cameraman, Sami Al Haj , avec une équipe de journalistes en Afghanistan pour couvrir la guerre de Bush. Après un transit obligatoire au Pakistan, l'équipe obtient enfin un visa d'entrée, mais elle juge utile de prolonger son séjour à Quetta, en raison de la violence du conflit. Sami Al Haj paie aujourd'hui le prix fort de cette précaution qui, pourtant, relève du sens commun. Mais on peut se demander si, dans cette affaire, le bon sens est vraiment la chose au monde la mieux partagée. Quand les forces nordistes, avec l'appui des Américains, l'emportent, l'équipe de journalistes tente de retourner à Kandahar. Elle a, au préalable, prorogé son visa d'entrée. C'est donc au moment de passer la frontière, à la mi-décembre 2001, que les forces armées pakistanaises sur ordre des américains arrêtent Sami Al Haj . Le cauchemar commence. Dénudé, dépouillé de ses effets personnels, la tête couverte, les pieds et les mains enchaînés, le journaliste est jeté dans un avion, en direction de la prison américaine de Bagram en Afghanistan. Ensuite, il sera transféré vers la base de Guantanamo, zone de non-droit toujours active, où il reste à ce jour incarcéré, sans le moindre chef d'inculpation.
Son avocat, Clive Stafford Smith, a déclaré il y a un an que son client avait enduré des tortures et des abus sexuels. Contraint de suivre un traitement pour un cancer de la gorge, les autorités américaines refusent de lui administrer. En revanche, un comité d'experts, nommé le Behavorial Science Consultation Team, emploie toute son intelligence à détruire un homme affaibli, de surcroît innocent. Sami Al Haj rapporte ces châtiments corporels : outre les privations de sommeil et les tortures psychologiques, les détenus subissent des sévices sexuels et des humiliations qui les obligent à uriner ou déféquer sur eux-mêmes. Aspergés de sang menstruel, soumis à des températures extrêmes, ces hommes doivent assister, voire participer, à la profanation de leur livre sacré. Mais Sami-Al-Hajj, qui a non seulement l'outrecuidance d'être musulman, s'avère également être un Noir. Son temps de récréation est, par conséquent, inférieur à celui des détenus blancs.
Selon Stafford-Smith, cette incarcération, dénuée de tout fondement légal et rationnel, répond à une volonté politique : « les Américains ont voulu, sous la menace, faire de lui un informateur censé confirmer des liens de toutes pièces fabriqués entre la chaîne de télévision arabe Al-Jazeera et le groupe Al-Qaïda. » Alternant la carotte (promesse d'accession à la nationalité américaine) et le bâton (menace pesant sur son épouse et sur leur jeune fils), ceux qui interrogent le journaliste se sont heurtés à un refus. « A titre strictement personnel, je ressens de l'admiration pour le courage dont fait preuve Sami Al Haj » observe son avocat. « Il est tout à fait innocent. Aussi terroriste que mon grand-père. La seule raison qui explique un tel traitement, c'est son appartenance à la chaîne d'information Al-Jazeera. »
Vivement critiquée par l'Arabie Saoudite, comme par les États-Unis, celle-ci semble oeuvrer, de quelque façon, en faveur du rapprochement des riches par delà les divergences culturelles. Mais c'est une vertu que nul hélas ne lui reconnaît. On l'accuse de rendre publics les messages des ennemis de la liberté. Mais si la télévision occidentale elle-même répondait à cette injonction extrême, elle serait privée d'information et tout à fait silencieuse. Les dépêches regorgent de crimes inesthétiques ou immoraux dont il faut toutefois rendre compte. La guerre contre le terrorisme seule explique cette volonté de museler une certaine presse, en persécutant des journalistes qui ne font que leur travail. Stafford Smith déplore que les associations et les médias occidentaux soient si peu sensibles à la souffrance de Sami Al Haj qui découle du mépris pour les droits de l'Homme et pour la liberté de l'information. Pourtant, il est à noter qu'une pétition circule sur internet, à l'initiative d'Amnesty International (Groupe 54 d'Ottignies-Louvain-La-Neuve). Ce ne sera sans doute pas assez pour que s'achève ce long périple au bout de l'enfer de la cellule 345 qui est aussi, pour tout citoyen soucieux du respect des droits de l'Homme, un voyage au bout de la honte.
Source : najzoug@yahoo.fr
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