Washington interdit l’accès de Guantánamo à un émissaire de l’ONU
Par Amine Djazairi, El Watan, 2 juin 2007
Par Amine Djazairi, El Watan, 2 juin 2007
Mais que se passe-t-il réellement à Guantánamo ? Cette prison qui se niche dans une base militaire navale américaine à Cuba échappe totalement au contrôle de la communauté internationale. Une tache noire dans le droit international. Les Etats-Unis gardent le secret total sur cette prison de haute sécurité. Genève : De notre correspondant Washington a refusé l’accès à Guantánamo à un expert de l’ONU sur les mesures antiterroristes.
Le rapporteur spécial de l’ONU sur les mesures antiterroristes Martin Scheinin n’a pas pu se rendre à Guantánamo lors de sa visite de dix jours aux Etats-Unis. Depuis Genève, ville détentrice des conventions des droits de l’homme et du droit humanitaire, le haut fonctionnaire onusien a regretté ce refus et espéré un changement d’attitude de Washington. Dans un premier bilan de sa visite, effectuée du 16 au 25 mai, l´expert de l’ONU déplore que les autorités américaines ne lui aient pas permis d’accéder aux lieux de détention, dont la base de Guantánamo , avec des garanties pour avoir des entretiens sans témoin avec les détenus.
Près de 400 détenus présumés terroristes se trouvent encore à Guantánamo . Martin Scheinin s’est déclaré encouragé par le vœu exprimé par le président George W. Bush de fermer la base américaine à Cuba. Selon l’expert, les Etats-Unis prévoient de faire juger entre 40 et 80 détenus par les commissions militaires. Les autres seront renvoyés vers leur pays d’origine ou, si nécessaire, vers un autre pays. L’expert de l’ONU invite Washington à coopérer avec le haut commissariat de l’ONU aux réfugiés (HCR) pour effectuer leur réinstallation en conformité avec le droit international. Il fera un rapport de manière plus détaillée au Conseil des droits de l’homme. Il espère que d’ici l’examen de son rapport, Washington reviendra sur son refus et l’autorisera à se rendre à Guantánamo , indique un communiqué des Nations unies. Une fois encore, Amnesty International a lancé un énième cri de colère. Il y a plus de cinq ans que les autorités des Etats-Unis transféraient les premiers détenus de la « guerre contre le terrorisme » au camp de détention de Guantánamo .
Malgré des protestations internationales, des centaines de personnes représentant plus de 30 nationalités sont toujours détenues là-bas. Elles n’ont jamais été inculpées et il est peu probable qu’elles bénéficient un jour d’un procès équitable, observe l’ONG occidentale. « Trop, c’est trop ! Guantánamo est un symbole d’injustice et de mauvais traitements. Le gouvernement des Etats-Unis doit fermer le camp », tonne Amnesty International qui a fait du combat pour la fermeture de ce camp de la honte sa première priorité. Si les personnes détenues par les Américains sont dangereuses pour la sécurité des USA qu’elles soient jugées pour leur actes et non pas dépérir dans des cages grillagées et des cellules à sécurité maximale, soulignent les défenseurs des droits de l’homme.
En outre, une nouvelle installation ouverte en décembre 2006, connue sous le nom de Camp 6, a créé des conditions encore plus dures et, semble-t-il, plus permanentes d’isolement extrême et de privation sensorielle, soulignent plusieurs ONG qui peinent à faire entendre leurs voix dans les médias occidentaux. Ces derniers préfèrent fermer les yeux sur les dépassements américains. Est-il admissible dans une veille démocratie comme celle de l’Amérique que des détenus soient confinés 22 heures par jour dans des cellules d’acier individuelles et fermées, où ils sont presque entièrement coupés de tout contact humain. Ces cellules ne possèdent pas de fenêtres extérieures, ni d’accès à la lumière naturelle ou à l’air frais. Aucune activité n’existe, et les détenus sont soumis à un éclairage permanent et à une surveillance constante des gardiens par les ouvertures des portes de cellules. Les détenus se livrent seuls à de l’exercice, dans une cour entourée de murs élevés, où la lumière du jour ne parvient guère. Les détenus ne se voient souvent proposer de sortir que la nuit, et peuvent ne pas voir la lumière du jour pendant plusieurs journées. Amnesty craint que ces conditions de détention, en plus de leur inhumanité, puissent avoir de graves effets sur la santé psychologique et physique de nombreux détenus. Ces derniers ont choisi le suicide pour échapper à leurs geôliers. Combien sont-ils ?
Le rapporteur spécial de l’ONU sur les mesures antiterroristes Martin Scheinin souhaite lever le voile sur les conditions des prisonniers et l’horreur qui hante Guantánamo , sans succès. Désormais, la prison américaine garde pour l’instant le secret de ces pratiques d’un autre âge.
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