mardi 19 février 2008

Pornographie impériale


Des milliers d'interrogatoires à Guantanamo ont été filmés

WASHINGTON - Plus de 24.000 interrogatoires de terroristes présumés menés à Guantanamo ont été filmés, même si l'existence de ces bandes vidéos n'a jamais été officiellement confirmée, selon un rapport universitaire publié jeudi.
Un porte-parole de la base navale américaine à Cuba a précisé que si les interrogatoires étaient "surveillés", ils n'étaient en général pas enregistrés.
Le rapport rédigé par des professeurs et étudiants de la faculté de droit de Seton (New Jersey, est) cite pourtant des documents officiels faisant état d'enregistrements.
"Tous les interrogatoires sont enregistrés sur vidéo", signale ainsi le médecin-chef de l'Armée en mai 2005, le général Kevin Kiley, dans un rapport interne, alors qu'un autre rapport quelques semaines plus tard estimait à plus de 24.000 le nombre d'interrogatoires menés sur la base entre 2002 et 2005.
Dans les compte-rendus d'interrogatoires ou d'incidents, il arrive aussi que les détenus fassent référence à la présence de caméras autour d'eux.
"Il n'est pas requis que les interrogatoires à Guantanamo soient enregistrés sur vidéo, et ils ne l'ont en général pas été. Ceci dit, nous avons toujours surveillé les interrogatoires (...) pour assurer un traitement sûr et humain des détenus", a déclaré un porte-parole de la base, Rick Haupt.
Même si la déclaration du général Kiley se trouve bien dans son rapport de 2005, elle est "erronée", a précisé le commandant Haupt, rappelant qu'il s'agit d'un document établi par des autorités médicales, pas par des responsables du renseignement.
En décembre, la CIA avait soulevé la polémique en reconnaissant avoir détruit des bandes vidéo qui montraient les interrogatoires de deux terroristes présumés.
Ces bandes "ne représentaient qu'une fraction infime des peut-être 24.000 interrogatoires enregistrés", concluent les auteurs du rapport, rédigé sous la direction de Mark Denbeaux, un professeur de droit qui représente plusieurs détenus et qui s'inquiète de ce qu'ont pu devenir les enregistrements.
En 2005, plusieurs juges chargés de plaintes pour mauvais traitements déposés par des détenus avaient ordonné au gouvernement de préserver tout document susceptible d'intéresser la procédure.
Dans un document déposé en janvier devant l'un de ces juges, l'actuel commandant de Guantanamo, l'amiral Mark Buzby, a reconnu une première violation.
Les enregistrements des multiples caméras de surveillance des prisons, susceptibles de montrer si des gardiens avaient effectivement maltraité ou humilié des détenus en dehors des interrogatoires, n'ont jamais été sauvegardés plus de quelques semaines, les bandes étant régulièrement réutilisées.
Source : AFP, 14 février 2008

dimanche 17 février 2008

Une petite phrase du Docteur K.

Le Figaro a publié cet article sous un titre proprement incroyable : "Kouchner piégé à New York par la chaîne al-Arabiya". En quoi, Al Arabiya a-t-elle piégé le Docteur K ? Parce qu'elle l'a enregistré parlant en anglais, langue qu'il maîtrise très mal ? Mais pourquoi le DocteurK s'acharne-t-il à faire des déclarations en anglais, alors que le français est une des 6 langues officielles des Nations Unies ? Comment comprendre le titre du Figaro ? Si CNN avait diffusé la même séquence, où K. aurait dit exactement la même chose, le Figaro aurait-il titré : "Kouchner démasqué par CNN" ? Quoiqu'il en soit, maintenant on le sait : pour le Docteur K, un "terroriste" est un "terroriste", quel que soit son âge.
Bernard Kouchner s'exprimait en anglais devant la presse aux Nations unies, mardi, à l'issue d'une réunion du Conseil de sécurité sur les enfants dans les conflits armés. Interrogé sur le sort d'un jeune Canadien à Guantanamo, Bernard Kouchner a déclaré ne faire «aucune différence entre les prisonniers».
Interrogé par la chaîne al-Arabiya sur le sort d'un jeune Canadien d'origine afghane jugé par les autorités militaires américaines de Guantanamo pour le meurtre d'un GI, Bernard Kouchner a déçu la presse arabe. «Je ne fais aucune différence entre les prisonniers», a dit le chef de la diplomatie française, qui s'exprimait en anglais devant la presse aux Nations unies, mardi, à l'issue d'une réunion du Conseil de sécurité sur les enfants dans les conflits armés.
Omar Khadr avait 11 ans quand il a été enrôlé par al-Qaida et 15 ans lors de son arrestation en 2002. Mineur au moment des faits, il est néanmoins jugé comme un adulte. Le ministre des Affaires étrangères a convenu que les enfants soldats sont «des victimes et des tueurs à la fois». En revanche, l'Unicef considère Omar Khadr comme un enfant soldat, donc comme une victime, et condamne la procédure d'exception engagée à son égard.
La position de Bernard Kouchner est en décalage avec celle exprimée par le porte-parole du Quai d'Orsay, le 23 janvier : «La France adhère pleinement aux engagements de Paris définis lors de la conférence “Libérons les enfants de la guerre” coorganisée avec l'Unicef en février 2007. Nous considérons que tout enfant associé à un conflit armé est une victime et doit être considéré comme tel. Mineur au moment des faits, M. Khadr doit donc bénéficier d'un traitement particulier.»
C'est aussi l'avis de l'ancien garde des Sceaux Robert Badinter, qui s'est vu refuser le droit d'assister à la première audience du jeune accusé par les autorités américaines. Faute de ces précisions, al-Arabiya n'a retenu que les propos laconiques de Bernard Kouchner. «Je ne sais que ce qu'il a dit et non ce qu'il voulait dire», a commenté Talal al-Haj, le correspondant de la chaîne à l'ONU.
Source : http://www.lefigaro.fr/international/2008/02/14/01003-20080214ARTFIG00336-kouchner-piege-a-new-york-par-la-chaine-al-arabiya-.php

mercredi 13 février 2008

Abou Elkassim Britel et une vidéo sur les transferts extraordinaires

Je vous signale une bonne vidéo sur les interprétations par Andrea Minoglio et Giovanni Bianchini accompagnant l'installation "extraordinary renditons" (par Giovanni Bianchini)
Cette vidéo (12 '15") se fonde sur l'histoire de Kassim et reproduit quelques moments de l'interprétation et de la détention secrète, en outre la vidéo documente le travail de Giovanni.
La vidéo est incisive et efficace pour représenter l'injustice de cette affaire : http://www.minoglio.it/?cat=45
À voir!
khadija
Titre de la vidéo: Livré
Idée et sujet: Giovanni Bianchini et Andrea Minoglio
Avec: Giovanni Bianchini, Pietro Bailo et Stefano "KiNO" Ferri. Prise de vue, direction et montage: Andrea Minoglio
Production:
www.minoglio.it - www.patatart.it
Année: 2008
Durée: 12 ''15
Format: Dvcam

Chaise électrique, potence ou injection mortelle ?

La peine de mort sera requise pour le cerveau présumé du 11/09

WASHINGTON (Reuters) - Les procureurs militaires américains ont retenu les chefs d'accusation de conspiration et de meurtre à l'encontre de Khalil Cheikh Mohamed, le cerveau présumé des attentats du 11 septembre 2001, et de cinq autres détenus de Guantanamo, contre lesquels ils requerront la peine de mort, annonce le Pentagone.
L'acte d'accusation doit encore être approuvé par Susan Crawford, désignée par le Pentagone pour superviser les procès des "ennemis combattants" détenus sur la base navale américaine et dont le feu vert est indispensable à la tenue d'un procès.
Il s'agit du premier acte d'accusation d'un tribunal militaire de Guantanamo portant sur une implication directe de suspects dans les attentats du 11-Septembre, et le premier aussi à requérir la peine capitale.
Au cours de ses interrogatoires, Khalid Cheikh Mohamed a déclaré qu'il avait entièrement planifié les attaques et qu'il en était responsable "de A à Z", selon une transcription de ses propos diffusée par le Pentagone en mars 2007.
La valeur juridique de ses aveux est toutefois sujette à caution, la CIA ayant reconnu l'avoir soumis à la technique dite du "waterboarding", ou simulation de noyade, au coeur du vaste débat sur la torture en cours aux Etats-Unis.
Source : Kristin Roberts, Reuters, version française Jean-Stéphane Brosse, Le Monde

Peine de mort contre les inculpés du 11 Septembre
Washington évoque Nuremberg pour justifier

Associated Press (AP) Matthew Lee 12/02/2008


L'administration Bush a demandé à ses diplomates en poste à l'étranger de défendre sa décision de demander la peine de mort contre les six détenus de Guantanamo inculpés pour les attentats du 11 septembre 2001 en évoquant les exécutions des criminels de guerre nazis issues des procès de Nuremberg après la Seconde guerre mondiale.
Dans un document de quatre pages envoyé lundi soir à toutes les ambassades américaines et obtenu par l'Associated Press, le département d'Etat souligne que la peine de mort pour des violations graves des lois régissant les conflits est acceptée à l'échelle internationale.
Il cite les procès de Nuremberg, lors desquels douze dignitaires nazis ont été condamnés à la peine capitale, même si tous n'ont pas été exécutés, et invite les diplomates à s'y référer si des gouvernements ou des médias étrangers venaient à les interroger sur la légalité de la peine de mort dans l'enquête sur les attentats du 11-Septembre.
«Les lois humanitaires internationales envisagent le recours à la peine de mort pour les violations graves des conventions de guerre», affirme ce document, rédigé par le cabinet du conseiller légal du département d'Etat, John Bellinger. «Les pires criminels de guerre condamnés à Nuremberg ont été exécutés».
Le courrier n'établit aucun lien entre l'échelle des crimes perpétrés par les Nazis -notamment l'Holocauste et ses six millions de morts- et ceux reprochés aux détenus de Guantanamo, inculpés pour les attentats qui ont fait près de 3 000 morts aux Etats-Unis le 11 septembre 2001. Il indique toutefois clairement que l'administration Bush considère les procès de Nuremberg comme un précédent historique pour justifier sa demande de recours à la peine capitale contre les six de Guantanamo.
La décision de Washington de requérir la peine de mort contre les inculpés va probablement occasionner des critiques au sein de la communauté internationale, plusieurs pays, dont des alliés des Etats-Unis, ayant déjà fait savoir qu'ils s'opposeraient à l'exécution de leurs ressortissants détenus à Guantanamo.
Le document adressé aux ambassades est donc rédigé sous la forme «questions-réponses» afin d'aider les diplomates à répondre aux éventuelles questions des autorités et médias des pays dans lesquels ils sont en poste.
«Il est demandé aux destinataires de puiser dans les points fournis ci-dessous pour leurs réponses aux demandes des gouvernements et médias étrangers», indique le document dans un résumé d'un paragraphe intitulé «Questions et réponses - Les détendus de Guantanamo inculpés pour le 11/9».
La référence à Nuremberg se trouve dans la réponse fournie à la question: «L'application de la peine de mort sur ces accusés enfreint-elle les lois internationales?». Après avoir fourni une réponse claire («non»), les rédacteurs du document expliquent le recours au précédent de Nuremberg.
Parmi les six hommes notamment inculpés de meurtre et de terrorisme, figure Khalid Cheikh Mohammed, cerveau présumé des attentats contre le World Trade Center à New York et le Pentagone à Washington. L'armée va recommander que les six hommes soient jugés en même temps devant un tribunal militaire. Mais l'affaire pourrait être brouillée en raison des récentes révélations sur les interrogatoires musclés qu'a subis Mohammed, soumis à la pratique du «waterboarding», qui consiste à simuler la noyade, et que les détracteurs qualifient d'acte de torture.
Le document du département d'Etat y fait spécifiquement référence et conseille aux diplomates d'assurer aux gouvernements étrangers que le tribunal militaire n'acceptera aucune preuve obtenue sous la torture et que les prévenus pourront faire objection à toute déclaration qu'ils estiment avoir faite sous la contrainte.
Outre Khalid Cheikh Mohammed, les inculpés sont: Mohammed al-Qahtani, présenté par des responsables américains comme le 20e pirate de l'air; Ramzi ben al-Shibh, qui aurait été le principal intermédiaire entre les pirates et la direction d'Al-Qaïda; Ali Abd al-Aziz Ali, un neveu de Mohammed présenté comme le lieutenant de ce dernier; l'assistant d'Al-Balouchi, Mustafa Ahmed al-Hawsaoui; et Walid ben Attash, qui aurait choisi et entraîné certains des pirates.

États-Unis. Exécuter des détenus de Guantánamo après des actes de torture et un jugement inique serait contraire à la justice
Amnesty International, COMMUNIQUÉ DE PRESSE, 11 février 2008

L’annonce faite par le Pentagone de l’inculpation de six détenus « de grande valeur » du camp de Guantánamo soulève de nouvelles questions sur la conduite des États-Unis dans la « guerre contre le terrorisme », a déclaré Amnesty International ce lundi 11 février.
« Depuis le crime contre l’humanité commis le 11 septembre 2001, Amnesty International appelle les États-Unis à poursuivre leur quête de justice et de sécurité en respectant les droits humains et la primauté de la loi, a déclaré Rob Freer, chargé des recherches sur les États-Unis au sein d’Amnesty International. Le manque de détermination du gouvernement américain à agir selon ces principes apparaît non seulement dans la façon dont ces six détenus ont été traités au cours des cinq dernières années ou plus qu’a duré leur détention, mais aussi dans la décision de les faire comparaître devant des commissions militaires. » Cinq des six inculpés ont été détenus secrètement pendant plus de trois ans par la CIA, dans des lieux de détention inconnus, avant d’être transférés à Guantánamo en septembre 2006. Ils ont été victimes d’une disparition forcée – crime de droit international – et la CIA a confirmé qu’au moins l’un d’entre eux, Khalid Sheikh Mohammed, avait été soumis au waterboarding, ou simulation de noyade.
« La simulation de noyade est une torture, et la torture est un crime aux termes du droit international, a déclaré Rob Freer. Or, nul n’a été tenu de rendre compte de ces crimes. L’impunité accordée dans le cadre du programme de la CIA reste une caractéristique de la conduite des États-Unis dans la « guerre contre le terrorisme ». »
Le sixième inculpé est Mohamed al Qahtani, soumis à des actes de torture et autres mauvais traitements à Guantánamo fin 2002. Bien qu’il ait subi des humiliations de nature sexuelle et autre, qu’il ait été privé de sommeil, encagoulé, contraint de se mettre nu, qu’il ait été soumis à une musique assourdissante, à un bruit de fond permanent, à des températures extrêmement froides ou chaudes, le Pentagone a conclu qu’il n’avait pas subi de traitements inhumains.
« Le Pentagone, tout comme le président, a une influence déterminante sur la façon dont opèrent les commissions militaires, a déclaré Rob Freer. En d’autres termes, ces substituts de tribunaux ne sont aucunement indépendants de l’exécutif qui a autorisé et légitimé les atteintes aux droits humains perpétrées contre ces détenus. »
Amnesty International craint que des informations arrachées sous la torture ou en ayant recours à d’autres formes de mauvais traitements ne soient utilisées à charge contre ces détenus. C’est là l’une des failles du système des commissions établi précisément pour obtenir des condamnations en appliquant des normes moins strictes que celles des tribunaux réguliers. Aucun citoyen américain ne peut être jugé par ces commissions militaires, ce qui les rend discriminatoires, en violation du droit international.
Déjà symbole d’illégalité, Guantánamo, pourrait à présent devenir un lieu d’exécutions, à l’issue de procès ne respectant aucune des règles du droit international. Le gouvernement cherche à obtenir la condamnation à mort de ces six hommes. Amnesty International s’oppose à la peine capitale en toutes circonstances. Plus de la moitié des pays dans le monde sont aujourd’hui abolitionnistes en droit ou en pratique.
« Quelques semaines seulement après un vote à l’Assemblée générale des Nations unies en faveur de la fin des exécutions, les États-Unis font resurgir le spectre de condamnations à mort à l’issue de procès manifestement entachés d’irrégularités à Guantánamo. La communauté internationale doit mettre les États-Unis au défi de supprimer les commissions militaires et de faire juger les accusés par des tribunaux indépendants et impartiaux, excluant le recours à la peine de mort. »
Source : http://www.amnestyinternational.be/doc/article12466.html

dimanche 10 février 2008

Les parlementaires portugais ne veulent rien savoir

3 députés portugais...

Le parlement portugais a rejeté la demande de création d'une commission d'enquête sur le rôle des autorités portugaises dans le transfert présumé de prisonniers, accusés de terrorisme, vers le camp de Guantanamo.
Cette proposition avait été soumise au parlement par le Parti communiste et le Bloc de gauche (BE, extrême gauche), après la publication fin janvier du rapport de l'ONG britannique «Reprieve» accusant le Portugal d'avoir contribué au transfert de plus de 700 prisonniers vers Guantanamo.Les principales formations parlementaires de gauche comme de droite ont voté contre la mise en place de cette commission, jugée «inopportune et inutile» par le ministre des Affaires parlementaires Augusto Santos e Silva.L'exécutif a toujours communiqué au parlement «toutes les informations» dont il disposait sur ce dossier, a affirmé le ministre.Le gouvernement portugais a répété à plusieurs reprises avoir enquêté sur l'utilisation de son espace aérien par des avions de la CIA mais n'avoir trouvé aucun preuve d'illégalité.En février 2007, la justice portugaise a ouvert à son tour une enquête sur l'éventuel survol du territoire portugais par des appareils transportant secrètement des prisonniers pour le compte de la CIA.Selon Reprieve, 94 vols, à destination ou en provenance de Guantanamo, ont emprunté l'espace aérien portugais entre 2002 et 2006.

Source : AFP, 8 février 2008

samedi 9 février 2008

Le Canada, Guantánamo et l'Afghanistan dans le brouillard électoral

Revue de presse par Manon Cornellier, Le Devoir, Montréal, 9 février 2008
Le manque de transparence du gouvernement Harper ne cesse, semaine après semaine, de susciter des commentaires, éditoriaux et chroniques. Cette préoccupation n'est pas l'apanage de la communauté journalistique. Dans un reportage paru dans le National Post, Norma Greenaway constate la même inquiétude du côté du commissaire à l'information Robert Marleau, qui a dû traiter deux fois plus de plaintes cette année. Expert en gouvernance de l'Université d'Ottawa, David Zussman constate une «forte préférence pour des communications centralisées» au sein du gouvernement Harper. Greenaway évoque les fonctionnaires, ambassadeurs, ministres et députés muselés, le secret qui entoure plusieurs politiques publiques et les critiques venues du comité Manley. Ancien greffier du Conseil privé, Mel Cappe confie que la stratégie de Harper est «contreproductive». Donald Savoie, un universitaire qui a beaucoup écrit sur la concentration du pouvoir, parle d'une approche «risquée», comme l'a montré le changement de politique concernant le transfert des détenus afghans. Selon Savoie, tenir cela secret incite «les gens à soupçonner le pire et à se demander ce qu'on tente de cacher».

Le Telegram, de St. John's, déplore d'ailleurs qu'on doive de plus en plus avoir recours à la Loi d'accès à l'information pour obtenir de l'information parfois banale ou aisément accessible dans d'autres pays. Il cite l'arrêt du transfert des détenus afghans. Si les bonnes nouvelles sont tenues secrètes, imaginez les mauvaises. «Le gouvernement Harper a obtenu un mandat minoritaire en faisant campagne avant tout sur la responsabilité. Le message arrivait à point dans la foulée du scandale des commandites survenu sous les libéraux. Jusqu'à présent, les conservateurs ne semblent pas disposés à respecter cette promesse. En fait, ils s'enfoncent toujours davantage dans une culture du secret.»

James Travers, du Toronto Star, résume la chose durement: «Dans la capitale de Stephen Harper, il est plus important de croire que de savoir.» Selon Travers, Harper «sous-estime l'intelligence des électeurs en leur offrant une version simplifiée à l'excès des politiques publiques». Dans une seconde chronique, Travers pense qu'en plus d'empêcher la création d'un lien de confiance entre Harper et les Canadiens, cette approche nuit à la mission afghane. «L'appui politique à une mission qui suscite la division ne peut être maintenu sous un gouvernement minoritaire qui ne fait pas assez confiance aux Canadiens pour leur dire la vérité.» Selon Travers, le sort des détenus afghans ne préoccupe peut-être pas directement les citoyens, mais cette affaire et le secret qui l'entoure servent à rappeler aux Canadiens que le gouvernement Harper est prêt à tout pour poursuivre la mission, y compris ne pas être franc avec eux.
À la guerre...
Parlant de détenus, il y a un Canadien fait prisonnier en Afghanistan qui est toujours détenu à Guantánamo. Le refus du gouvernement Harper d'intervenir soulève l'indignation. Si Ottawa avait besoin d'une excuse pour se mouiller, écrit le Toronto Star, il l'a obtenue cette semaine lorsqu'on a appris que personne n'a vu Omar Kadhr lancer la grenade qui a tué un militaire américain. Le soldat qui a témoigné aurait déduit que c'était Khadr, même si un autre combattant se trouvait sur les lieux. Le Star trouve honteuse l'inaction d'Ottawa alors que Kadhr risque une peine de prison à perpétuité pour un acte commis alors qu'il n'avait que 15 ans et était sous l'influence de son père. Des juristes canadiens et étrangers et même le gouvernement français ont tenté de prendre la défense de Kadhr, le présentant comme un enfant soldat. Tous les autres pays occidentaux ont aussi rapatrié leurs ressortissants détenus à Guantánamo. Harper, lui, reste de marbre. «Tout ceci est indécent. Peu de Canadiens ont de la sympathie pour Khadr et sa famille, mais ce qui se passe à Guantánamo n'a rien à voir avec la justice. C'est de la vengeance, et l'assentiment du gouvernement Harper est profondément dérangeant», écrit le Star.

Le StarPhoenix, de Saskatoon, soutient que l'attitude du gouvernement canadien -- libéral d'abord et conservateur ensuite -- porte atteinte à la réputation du pays et le met dans le même camp que les États-Unis dans ce dossier. «Si un pays croit aux droits de la personne, il doit les défendre sans exception. Et si quelqu'un croit en la réhabilitation plutôt qu'en la punition des enfants victimes d'endoctrinement à des fins terroristes et militaires, il ne peut réserver cette défense qu'à des victimes anonymes à l'autre bout du monde», s'insurge le quotidien, qui ajoute: «Le Canada se bat peut-être pour les droits des enfants afghans, mais il ne semble pas avoir le courage de se battre pour les siens.»

Le Globe and Mail n'est pas plus tendre. «Par son silence, le Canada a dit aux États-Unis qu'ils pouvaient faire ce qu'ils voulaient avec le jeune prisonnier.» Dire qu'il faut laisser un processus injuste suivre son cours ne tient pas, dit le Globe. «Un citoyen mineur du Canada n'a pas été simplement puni mais humilié au moyen d'une longue et douloureuse incarcération durant laquelle il a été privé de ses droits.» Le Canada, dit le quotidien, doit imiter les autres pays occidentaux et négocier le rapatriement de Khadr.

Aux urnes...
Ça parle d'élections à Ottawa, mais c'est en Alberta qu'il y en aura le 3 mars prochain, après 37 ans de règne conservateur. «Ils sont au pouvoir depuis l'année où Janis Joplin est morte, ironise Rick Bell, du Calgary Sun, et ils se présentent comme étant d'une certaine manière la voix du changement!» Ils disent avoir un plan maintenant, ce qu'ils n'avaient pas avant. «Ils n'aimaient pas ça, avoir un plan, poursuit Bell. Ils aimaient gérer sur le pilote automatique et s'en vantaient.» Le pire est qu'ils ont des chances d'être réélus, écrit-il abasourdi.

Les USA admettent l’existence de cellules ultrasecrètes à Guantanamo

LE chef du très contesté centre de détention que les Etats-Unis maintiennent à l’extrême sud-est de Cuba contre la volonté de l’île, le vice-amiral Mark Buzby, a déclaré que 15 personnes étaient détenues dans des cellules d’un camp ultrasecret de haute sécurité construit à Guantanamo.
La CIA a admis l’emploi de la torture à Guantanamo.
Buzby, commandant des forces conjointes de Guantanamo, a déclaré que le Camp 7 était une prison de haute sécurité qui avait déjà été construite quand le président George W. Bush a annoncé en septembre 2006 que 14 supposés terroristes de grande importance avaient été transportés d’une des si nombreuses prisons secrètes de l’agence centrale de renseignements des Etats-Unis (CIA) à Guantanamo.
Un militaire a décrit l’endroit comme une annexe de haute sécurité destinée à isoler les prisonniers pour les empêcher d’entrer en contact avec d’autres détenus, pour des raisons de sécurité.
Le directeur de la CIA, Michael Hayden, a admis l’application de la méthode de la simulation d’étouffement, considéré comme une torture par toutes les conventions internationales des droits de l’homme.
La technique criminelle, utilisée par la CIA dans les interrogatoires de suspects de terrorisme, consiste à attacher une personne, d’incliner sa tête en arrière, de couvrir sa tête et de lui verser de l’eau pour qu’il sente qu’il étouffe, dans le but de lui soutirer des informations.
Les méthodes de torture réalisées par des soldats des renseignements étasuniens ou par des mercenaires recrutés, ont été mis en évidence en 2005 quand ont été publié des photos qui montraient des prisonniers nus, attachés, enchaînés, humiliés sexuellement, frappés brutalement, couverts d’excréments humains ou intimidés avec des chiens dans la prison d’Abou Ghraib que les USA maintiennent en Irak, une des si nombreuses prisons clandestines étasuniennes.
Des groupes défenseurs des droits civils ont exigé la fermeture de la prison de Guantanamo, où sont dénoncés chaque jour des violations aux droits de l’homme des prisonniers.
Sources : TeleSUR-Prensa Latina-Ap/nn-NN Granma

jeudi 7 février 2008

La Maison Blanche défend la pratique du "waterboarding"

La Maison blanche a défendu mercredi la pratique du "waterboarding", qui consiste à simuler la noyade, assurant que c'était légal, et non une torture comme certains l'affirment, et que cela avait permis de sauver des Américains.
Le président George W. Bush pourrait autoriser le "waterboarding" dans l'avenir à l'encontre de suspects de terrorisme, en fonction de certaines "circonstances", notamment si les autorités ont la conviction qu'une attaque "imminente" se prépare, selon le porte-parole adjoint de la Maison Blanche Tony Fratto.
Mardi, l'administration Bush a reconnu pour la première fois avoir pratiqué sur trois suspects de terrorisme cette technique d'interrogatoire considérée comme de la torture.
Les enquêteurs de la CIA pourraient avoir de nouveau recours au "waterboarding", mais ils auraient besoin du feu vert du président pour le faire, a précisé mercredi Tony Fratto.
A Genève, Manfred Nowak, rapporteur spécial de l'ONU sur la torture, a critiqué la position de la Maison Blanche sur cette question, exhortant l'administration Bush à renoncer à défendre ces méthodes d'interrogatoires "injustifiables".
"C'est absolument inacceptable dans le cadre de la législation internationale en matière des droits de l'homme", a-t-il affirmé.
Devant la commission du renseignement du Sénat mardi, le directeur de la CIA Michael Hayden est devenu le premier officiel du gouvernement à reconnaître publiquement que l'agence a pratiqué le "waterboarding", ou noyade simulée, sur trois membres présumés d'Al-Qaïda -Khalid Sheik Mohammed, le cerveau présumé des attentats du 11 septembre 2001, ainsi qu'Abou Zoubaïda et Abd al-Rahim al-Nashiri.
Pour tout savoir sur le "waterboarding", cliquer sur ce mot ci-dessous.

Les voyages d'Air-CIA : la justice espagnole enquête

Les aéroports espagnols ont-ils servi de base de transit aux avions nord-américains qui transportaient des prisonniers d’Afghanistan vers Guantánamo, le camp de torture installé par les Américains en territoire cubain ? C’est ce que la justice espagnole cherche à établir.
LE 25 janvier dernier, le procureur Vicente Gonzalez Mota a demandé au juge Ismael Moreno, deuxième juge d’instruction à la Audiencia nacional, d’ouvrir une information afin de déterminer si les aéroports de Morón de la Frontera, à Séville, de Rota à Cadix et de Torrejón de Ardoz, à Madrid, ont servi à l’aviation américaine dans des escales entre l’Afghanistan et la base de Guantánamo. Le juge devra entendre, en qualité de témoins, tous les officiers de vols, les officiers d’aéroport et les contrôleurs civils et militaires de ces bases, ainsi que les fonctionnaires du Ministère de la Défense et des Affaires étrangères et les personnels de l’AENA (Aéroports espagnols et Navigation aérienne) en poste entre janvier 2002 et décembre 2006.Ce front ouvert par la Justice espagnole est un effort pour réintroduire le droit contre des agissements qui, sous couvert de lutte anti-terrorisme, font régner la terreur dans un total mépris du droit des personnes, comme c’est le cas au camp de Guantánamo.
Les témoignages ci-après montrent que l’irruption de la justice espagnole a pu mettre un terme à des procédures d’arbitraires.

Convention militaire modifiée
La demande d’information du procureur va également chercher à déterminer quels étaient les fonctionnaires des ministères de la Défense et des Affaires étrangères qui, entre les dates évoquées, ont siégé dans le Comité permanent hispano-étatsunien, créé en application d’une Convention de coopération militaire signée en 1989 entre l’Espagne et les Etats-Unis. Cette Convention définit les circonstances et les normes selon lesquelles les avions affrétés par ou pour les forces US peuvent survoler, pénétrer ou sortir de l’espace aérien espagnol ou en utiliser les bases. En 2002, quelques mois après le 11/9 et après l’invasion de l’Afghanistan, les gouvernements de José Maria Aznar et de son allié Georges Bush ont modifié cette convention bilatérale de Défense, pour en assouplir les autorisations d’escale des avions états-uniens sur les bases de Rota y Morón.
La Justice espagnole veut savoir si ces “assouplissements” ont servi à faire transiter les 23 premiers prisonniers envoyés de Kandahar (Afghanistan) à la base de Cuba, dans un avion C-17 Globemaster des Forces aériennes des EE-UU. En janvier 2002, selon l’agence de presse AP, ces prisonniers ont changé d’avion pour un C-141 Starlifter « dans un pays européen », disait la dépêche.Cette information est corroborée par une autre, émanant des registres du contrôle aérien des Açores (Portugal) qui certifient que cet avion C-141 a décollé le 11 janvier 2002 de la base de Morón à destination de Guantánamo.

Recherche de témoins
C’est sur cette base que le cabinet d’avocat londonien Reprieve dirigé par Clive Stafford Smith, qui représente une trentaine de prisonniers de Guantánamo, évoque aussi le rôle de l’Espagne dans ce transfert. Le cabinet londonien soutient que l’escale du 11 janvier eut lieu à la base de Morón de la Frontera, près de Séville et que 24 autres prisonniers, également identifiés, ont voyagé à bord d’un C-17 qui, toujours d’après le registre du Portugal, fit le vol de la base de Rota à celle de Guantánamo le 28 octobre 2002. Quelqu’un a-t-il vu ces prisonniers lors de leur passage en Espagne ? Ce sont ces témoignages que recherche la justice espagnole, indiquant que « si quelqu’un a vu dans ces aéroports le transfert de prisonniers d’un avion à un autre, cela peut représenter un changement substantiel ».
Entre 2002 et 2007, l’AENA a enregistré dans les aéroports espagnols 47 vols secrets, en provenance ou à destination de la base US de Guantánamo. Le gouvernement espagnol nie que ces vols aient servi à transférer des prisonniers vers le camp de Guantánamo. Mais selon la note du procureur guidant les investigations vers les ministères de la Défense et des Affaires étrangères, il y aurait eu sur ce nombre une douzaine de vols avec escale, dont on peut présumer qu’ils ont transporté des dizaines de prisonniers. Parmi eux, les deux avions qui, selon le cabinet londonien, avaient pour passagers 23 et 24 prisonniers de nationalités différentes, tous identifiés et dirigés vers Cuba.
D’après un article de José Maria Irujo paru le 4 février 2008

« J’ai voyagé ligoté, avec le canon de ses armes sur ma tête »
« J’ai voyagé de nuit, couché sur le plancher d’un avion militaire. On m’avait couvert la tête d’une cagoule et ligoté au sol par les mains et les pieds. De temps en temps, des soldats plaquaient le canon de leurs armes contre ma tête. Ce fut un long voyage et ils ne savaient pas bien où ils m’emmenaient ».C’est par ces mots que le prisonnier marocain Lahcen Ikassrien, 40 ans, se souvient de son transfert d’Espagne à Guantánamo, base navale états-unienne en territoire cubain, où il est resté enfermé pendant presque 4 ans.
Ikassrien a été jugé et acquitté, parce que les interrogatoires auxquels l’ont soumis les policiers espagnols à Guantánamo et qui furent utilisés comme preuve contre lui, ont été annulés par le tribunal.
« Je suis arrivé à la base de Torrejón de Ardoz le 18 juillet 2005 et on m’a transféré directement à la Audiencia nationale. Je pesais 55 kilos et j’ai été interrogé par le juge Fernando Grande-Marlaska. De Madrid, on m’a envoyé à une prison de Palencia » relate Ikassrien qui, après son jugement, a été remis en liberté. Le Maroc lui refuse désormais un passeport.
Une autre personne, du nom de Hamed Abderraman, le dénommé “Taliban de Ceuta”, a subi un transfert semblable à celui de Lahcen. Il fut aussi acquitté par la Haute Cour espagnole sur le même argument.

Source : Témoignages, 7 février 2008

mercredi 6 février 2008

Omar Khadr

Lettre à Omar Khadr
par Jacqueline Remy, Poste restante, 5 février 2008
Cher Omar Khadr,
Vous avez 21 ans, mais vous n'en aviez que 15 au moment des faits. Le commission militaire de Guantanamo chargée d'examiner le recours de vos avocats doit choisir le 4 et le 5 entre l'humanité et la barbarie, entre la justice et la transgression de toutes les règles internationales. Vous êtes accusé de meurtre, de terrorisme et d'espionnage (etc), pour avoir fabriqué des explosifs et blessé à mort un soldat américain en lançant une grenade au moment de votre arrestation. Vous avez 21 ans, mais vous n'aviez que 15 ans au moment des faits. On vous emprisonné, maltraité, accusé comme un adulte.Comment peut-on juger un enfant devant un tribunal militaire d'exception?
Un enfant a droit à une justice pour mineurs, une justice dont en principe le but est d'éduquer, quelle que soit la peine ou le jugement. Vous êtes né dans une famille islamiste, vous avez été élevé dans les écoles islamistes, au Canada et au Pakistan. Dès l'âge de 11 ans, on vous a enrôlé dans les rangs d'EL Qaida, quand votre famille s'est transportée en Afghanistan, dans un camp de base, dit-on, d'Oussama Ben Laden. Avez-vous, à un seul moment de votre existence, eu le choix de votre existence? Non. Avez-vous joui de votre libre arbitre? Jamais.
Les enfants soldats sont considérés par les institutions internationales comme des victimes. Vous êtes une victime. Vos avocats ont déposé un recours pour que les poursuites contre vous soient abandonnées. Espérons qu'elles le seront. Robert Badinter qui vous soutient de façon remarquable n'a pas obtenu l'autorisation d'être présent à Guantanamo, ces jours-ci. Si la commission militaire suit les arguments de vos avocats, qui réparera l'horreur de ces six années depuis votre arrestation? Si elle ne les suit pas, c'est un abus d'inhumanité.
L'Unicef évalue à 300 000 le nombre d'enfants soldats à travers le monde. Ils sont parfois très petits, bien plus jeunes que vous. Aucun d'entre eux ne peut être considéré comme un ennemi. Ce sont des enfants manipulés, transformés en chair à canon. Vous avez 21 ans, mais vous n'en aviez que 15 au moment des faits. L'oublier serait une honte pour nous tous.
Bien à vous.
JR
Audience à Guantanamo sur la validité des poursuites contre Omar Khadr
AFP, 04.02.08
Un juge militaire a examiné lundi plusieurs recours de la défense contestant la validité des poursuites contre Omar Khadr, un jeune Canadien qui doit être jugé à Guantanamo pour terrorisme, a-t-on appris de source militaire.
La date de la décision du juge n'est pas connue.
Omar Khadr avait 15 ans quand il a été arrêté en 2002 en Afghanistan. Il est accusé d'avoir fabriqué des explosifs et d'avoir tué un soldat américain en lançant une grenade lors de son arrestation. Son procès doit s'ouvrir en mai devant un tribunal militaire d'exception sur la base navale américaine à Cuba.
Mais la défense fait valoir que ces tribunaux d'exception n'ont pas autorité pour juger des mineurs, assurant qu'un éventuel procès d'Omar Khadr serait le premier dans l'histoire occidentale où un enfant aurait à répondre de crimes de guerre.
L'ancien ministre français de la Justice, Robert Badinter, soutenu par le gouvernement français, a appelé le juge militaire chargé de l'affaire, le colonel Peter Brownback, à reconnaître Omar Khadr comme un enfant-soldat, et donc non pas un combattant volontaire mais une victime d'Al-Qaïda.
M. Badinter avait demandé à se rendre à Guantanamo comme observateur, pour assister à l'audience, mais les autorités américaines ont refusé. Le Pentagone n'a pas donné d'explications. Cependant, plusieurs membres d'organisations de défense des droits de l'homme ont pu faire le voyage.
C'est le cas de Hina Shamsi, une avocate de la puissante ACLU, qui a dénoncé dans un communiqué l'insistance de l'administration à juger les terroristes présumés devant des tribunaux d'exception si contestés qu'aucun réel procès n'a encore eu lieu.
"Le fait que l'un des premiers tests pour ce système illégitime soit la comparution pour crimes de guerre de quelqu'un capturé enfant montre à quel point Guantanamo est un échec moral et légal", a-t-elle ajouté.
Pour l'instant, seuls quatre des quelque 275 détenus de la base navale font l'objet de poursuites, dont deux étaient mineurs au moment des faits.
En fin de semaine, une autre audience est prévue dans l'affaire de Salim Hamdan, un Yéménite qui a travaillé comme chauffeur et garde du corps pour Oussama Ben Laden et qui avait obtenu en juin 2006 que la Cour suprême invalide une première version des tribunaux militaires d'exception.
Alors que le procès est prévu début juin, ses avocats continuent à contester la validité des nouveaux tribunaux, instaurés par le Congrès à l'automne 2006. Ils entendent aussi faire valoir que leur client est trop traumatisé par ses années de détention à Guantanamo pour être jugé.
L'UNICEF préoccupée par le cas d'Omar Khadr, mineur lors de son incarcération à Guantanamo
Centre de nouvelles ONU, 4 février 2008
Le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) s'inquiète aujourd'hui du cas d'Omar Khadr, qui passera devant une commission militaire au centre de détention américain de Guantanamo Bay, alors qu'il n'avait que 15 ans lors de son arrestation en 2002 en Afghanistan.
« L'UNICEF pense que les enfants accusés d'avoir commis des crimes alors qu'ils étaient des enfants-soldats devraient avant tout être considérés comme victimes d'adultes qui ont bafoué le droit international en recrutant et en utilisant des enfants, et qu'il faut les aider en vue de leur réintégration sociale », affirme un communiqué de l'agence publié à New York.
Les personnes qui étaient âgées de moins de 18 ans au moment des faits reprochés doivent être traitées en accord avec les normes internationales de la justice pour mineurs, qui leur fournit une protection particulière, rappelle l'UNICEF.
Omar Khadr avait été arrêté en 2002 en Afghanistan pour des crimes qu'il aurait commis alors qu'il avait 15 ans. Aujourd'hui, une commission militaire à Guantanamo Bay doit décider si les poursuites à son encontre pour crimes de guerre doivent continuer.
L'agence de protection de l'enfance craint que ces poursuites, « en particulier devant une commission militaire qui n'est pas soumise aux normes requises », ne représentent un précédent « dangereux » pour la protection de centaines de milliers d'enfants qui se trouvent engagés involontairement dans des conflits dans le monde.
L'actuel Secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, ainsi que son prédécesseur, se sont prononcés en faveur de la fermeture du centre de détention américain de Guantanamo, sur l'île de Cuba, où des dizaines de personnes soupçonnées d'appartenir à l'organisation terroriste Al-Qaida sont détenues au secret sans avoir été inculpés (dépêche du 11.01.2007).

Au Yémen, conférence à grand spectacle contre Guantanamo

(De Sanaa) Le petit badge jaune arboré par les représentants d'Amnesty International donne le ton: Guantanamo est une exception, juridique, militaire, sécuritaire et humaine. Une exception à combattre. Le mois dernier, ils s'étaient donné rendez-vous à Sanaa, pour la troisième fois, afin de sortir du silence le cas de ces détenus yéménites de la prison américaine située sur l'île de Cuba: avocats, anciens détenus, familles des prisonniers, parlementaires et ministres, représentants des ONG, journalistes.
Car les Yéménites sont aujourd'hui, à leur tour, une exception: ils forment le plus important contingent de prisonniers de Guantanamo. Seuls 13, sur un total de 107, ont pu regagner leur pays natal au cours des derniers mois. Une véritable discrimination selon Clive Smith, l'avocat britannique de plusieurs d'entre eux. Il rappelle que 500 prisonniers ont déjà été libérés, dont plus de 90% de Saoudiens.
Lire la suite de l'article de François-Xavier Trégan sur Rue89

mardi 5 février 2008

Une aile canadienne à la prison de Kaboul

Le projet est à l'étude, confirme Bernier
par Gilles Toupin, La Presse, Ottawa, 5 février 2008

«Le Canada n'est pas dans l'industrie de la construction de prisons», a déclaré aux Communes le ministre des Affaires étrangères, Maxime Bernier, en réaction à l'information publiée par La Presse hier qui révélait l'intention du gouvernement Harper de construire un bâtiment à l'intérieur de la prison de Kaboul, Pul-e-Charkhi, pour y loger les talibans capturés par les soldats canadiens.
M. Bernier répondait à une question du critique libéral en matière de défense, le député Denis Coderre.
Pourtant, a rapporté La Presse hier, c'est le directeur de la prison Pul-e-Charkhi à Kaboul qui a lui-même confirmé que des responsables canadiens avaient visité la prison il y a une dizaine de jours pour déterminer l'endroit où pourrait être aménagé cette aile canadienne.Le ministre des Affaires étrangères, interrogé plus tard sur les ondes d'une chaîne de télévision anglophone, a finalement confirmé l'information en affirmant que son ministère examinait ce scénario.
«Nous n'avons pas besoin d'un Guantánamo canadien», a aussitôt déclaré Denis Coderre, qui a qualifié M. Bernier de «pire ministre des Affaires étrangères» de l'histoire canadienne. M. Coderre a souligné que l'information publiée par La Presse était on ne peut plus crédible puisqu'elle venait du ministre de la Justice de l'Afghanistan.
Il a rappelé que la prison Pul-e-Charkhi abrite aussi une aile, aménagée à coups de millions de dollars, où les Américains emprisonnent leurs propres prisonniers; de là le surnom de Guantánamo donné par les Afghans à cette section de la prison.
«Tout cela veut dire plusieurs choses, a encore commenté le porte-parole libéral en matière de défense. Si nous sommes obligés de transférer les prisonniers dans notre propre prison, c'est que l'entente avec les autorités afghanes sur le transfert des prisonniers ne fonctionne pas.»
M. Coderre reproche au gouvernement Harper de garder le silence sur cette nouvelle affaire. «Au lieu de nous donner des réponses plates à saveur de Jos. Louis, on devrait avoir de vraies réponses, a-t-il dit aux journalistes. Parce que si on parle de bâtir une prison dans une prison, au détriment de l'OTAN, j'ai un problème avec cela. Il faut d'abord une entente entre l'OTAN et le gouvernement afghan. Deuxièmement, avant de s'embarquer dans ce projet, on devrait peut-être nous dire ce qui se passe présentement avec les détenus afghans capturés par les soldats canadiens.»
Le député Coderre croit que si le gouvernement conservateur veut gérer sa propre prison en Afghanistan, c'est peut-être en raison de son incapacité à empêcher les Afghans de torturer les prisonniers qui leur sont remis.

Dion rencontre Harper aujourd'hui
Pendant ce temps, le chef libéral Stéphane Dion s'apprête à rencontrer aujourd'hui le premier ministre Stephen Harper afin de trouver un terrain d'entente sur la suite à donner à la mission canadienne. M. Dion insiste pour que les activités de combat des Forces armées canadiennes en Afghanistan cessent dans un an et que de nouvelles tâches soient assignées aux soldats, notamment l'entraînement de l'Armée nationale afghane et la couverture sécuritaire des projets canadiens de reconstruction.
Le premier ministre, Stephen Harper, a pour sa part appuyé le rapport de l'ancien ministre libéral John Manley qui préconise la prolongation de la mission en Afghanistan à la condition que l'OTAN fournisse quelque 1000 hommes supplémentaires à Kandahar ainsi que des drones et des hélicoptères.
Hier M. Dion est demeuré ferme sur la nécessité de mettre fin à la mission de combat en février 2009. Il a cependant ouvert la porte à certains aménagements.
«Nous avons des responsabilités jusqu'en 2011, ne serait-ce qu'à cause de l'équipe de reconstruction à Kandahar qui est canadienne, a-t-il dit. Alors qu'est-ce qu'on peut faire en Afghanistan durant ces deux années-là? Il y a des choses qu'on peut discuter avec le gouvernement, mais on ne sait pas ce que lui-même propose.»

Dion et Layton incapables de s'entendre
Par ailleurs, M. Dion a rencontré hier soir le chef du NPD, Jack Layton, afin de le convaincre d'épouser le point de vue des libéraux sur la mission afghane.M. Layton voulait pour sa part que le chef libéral adopte la position néo-démocrate, qui demande un retrait immédiat et total des Forces canadiennes de l'Afghanistan. Comme on s'y attendait, les deux hommes ne sont pas parvenus à s'entendre.Les Communes seront éventuellement appelées à voter sur l'avenir de la mission militaire en Afghanistan. On ne sait pas encore si le gouvernement Harper fera de ce vote un vote de confiance.

Amnesty international pour le retour de deux Mauritaniens emprisonnés à Guantanamo

Gaetan Mootoo, en visite à Nouakchott à la tête d'une délégation d'Amnesty international, a demandé lundi "aux autorités mauritaniennes d'intercéder pour que les deux Mauritaniens se trouvant encore à Guantanamo", a-t-on appris de sources officielles. M. Mootoo, reçu lundi soir par le chef de l'Etat mauritanien Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi, a révélé avoir salué, au cours de l'audience avec dernier, "le retour d'un Mauritanien qui était à Guantanamo" et demandé "aux autorités mauritaniennes d'intercéder pour que les deux Mauritaniens se trouvant encore" dans cette prison puissent revenir.
A sa sortie d'audience, M. Mootoo a fait une déclaration à l'Agence mauritanienne d'Information, dans laquelle il a indiqué être venu pour échanger avec les autorités mauritaniennes au sujet des préoccupations dans ce pays, notamment les questions liées au passif humanitaire dans les années 80. "Nous avons soulevé également la question du retour des réfugiés", a-t-il ajouté, précisant que l'entretien a aussi porté sur les violations des droits de l'homme pendant la période passée.
"Nous avons aussi salué la décision des autorités de criminaliser l'esclavage", a-t-il souligné, ajoutant avoir eu, avec le président mauritanien, "un échange utile sur la peine de mort pour que la Mauritanie continue d'observer ce moratoire de facto".
Source : XINHUA, 5 février 2008

Maroc : Un à dix ans de prison pour 17 accusés d'activités terroristes

La justice marocaine a condamné lundi 17 membres d'une cellule accusée d'activités terroristes de peines allant de un an à 10 ans de prison ferme, à l'issue d'un procès. Trois principaux accusés de cette cellule comprenant 21 membres, ont écopé de 10 ans de réclusion alors que 14 autres auront à purger entre un an et six ans. Les principaux chefs d'accusation retenus contre les prévenus est la constitution d'une bande criminelle et collecte de fonds pour « perpétrer des actes terroristes » sur le territoire marocain.
Un ressortissant belge d'origine marocaine est présenté comme le chef de file de cette cellule qui comprend deux ex-détenus à Guantanamo. Quatre accusés ont été acquittés. La police marocaine avait démantelé la cellule en question en novembre dernier après l'avoir soupçonnée d'appartenir à un mouvement intégriste lié à Al-Qaïda. Selon le parquet marocain, l'objectif de ce groupe était de mobiliser des jeunes marocains « pour les envoyer suivre des entraînements paramilitaires à l'étranger avant de revenir commettre des actes de sabotage au Maroc ».
Source : APANEWS, 5 février 2008 -