Les juges parisiennes Sophie Clément et Nathalie Frydman, chargées d'instruire la plainte pour "détention arbitraire, enlèvement et séquestration" des ex-détenus français de Guantánamo, ont demandé la levée du secret-défense. Cette demande adressée le 17 octobre aux ministères de la défense, de l'intérieur et des affaires étrangères a été transmise à la commission consultative du secret de la défense nationale (CCSDN), le 10 novembre, qui en a accusé réception le 29. Celle-ci devrait rendre son avis - généralement suivi par les ministres - dans le courant du premier trimestre 2007.
Interpellés au Pakistan en décembre 2001 après qu'ils eurent séjourné dans des camps d'entraînement d'Al-Qaida en Afghanistan, les ex-détenus avaient été transportés par les troupes américaines vers Guantánamo. Les deux magistrates sont intéressées par les interrogatoires qu'ils ont subis en 2002 sous le contrôle des soldats américains et hors de tout cadre légal.
Leurs dépositions avaient été recueillies par un agent de la DGSE, un policier de la DST et un représentant de l'ambassade de France à Washington envoyés à Guantánamo. Les juges souhaitent obtenir les enregistrements et les scripts de ces auditions.La plainte déposée dès 2002 à Lyon par Mes Jacques Debray et William Bourdon, les avocats de Nizar Sassi et de Mourad Benchellali - deux des six Français internés pendant plus de quatre ans à Guantánamo - avait été retenue à l'issue d'un marathon judiciaire arbitré le 4 janvier 2005 par la Cour de cassation qui avait confié le dossier à la cour d'appel de Paris.
Parallèlement au dossier instruit par Mmes Clément et Frydman, les juges de la section antiterroriste avaient été saisis en 2002 d'une information pour "association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste".
Renvoyés devant le tribunal correctionnel, les six anciens détenus ont comparu du 3 au 12 juillet. Le tribunal qui devait rendre son jugement le 27 septembre a décidé de rouvrir le procès le 2 mai 2007, afin de procéder à "un supplément d'information". Il avait estimé être "insuffisamment éclairé sur le cadre légal dans lequel sont intervenus plusieurs fonctionnaires, lorsqu'ils se sont rendus à plusieurs reprises sur la base de Guantánamo pour y rencontrer les prévenus" (Le Monde du 29 septembre).
Le président du tribunal, Jean-Claude Kross, devrait convoquer dans son cabinet les trois fonctionnaires français avant la fin de l'année. Si ces derniers refusent de répondre à ses questions, en opposant le secret-défense, il pourrait à son tour en demander la levée.
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